Activités du SIPAZ (de la mi-août à la mi-novembre 2017)
02/04/2018DOSSIER : Politique migratoire aux Etats-Unis et au Mexique – divergence de discours mais mêmes stratégies
16/06/2018En avril, la Chambre des Sénateurs a ratifié l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (TTP-11 ou CPTPP), le Mexique étant le premier pays de ceux qui l’intègrent à le faire. Le secteur privé a vu d’un bon œil la perspective de cet accord: « Les pays qui font partie du CPTPP concentrent 14% de la production annuelle du monde entier. Ils constituent ainsi l’une des plus grandes zones de libre-échange au monde. Cet accord ouvre les portes de dix économies du Pacifique aux producteurs et entrepreneurs mexicains ».
D’un autre côté, la Convergence des Organisations Sociales et Citoyennes a exigé «que ce traité ne soit pas ratifié et négocié en notre nom sans transparence et sans participation citoyenne». Il a demandé une audience au Sénat « pour exprimer ses appréciations et alternatives face aux contenus du Traité qui compromettent les droits de l’homme et la protection de la terre, malheureusement, à ce jour, nous n’avons pas été reçus ».
La Convergence a attribué la hâte à ratifier cet accord «à la crainte du gouvernement actuel qu’avec les élections de juillet la composition du pouvoir législatif ne change et que celui qui remporte la présidence ne cautionne pas le TTP-11». En outre, elle a déclaré qu’«il est à craindre qu’avec la même hâte et avant que le nouveau gouvernement et la prochaine législature n’entrent en fonction, la modernisation récemment conclue de l’Accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mexique (TLCUEM) soit approuvée, de même que la renégociation de l’Accord de libre-échange d’Amérique du Nord (ALENA) ».
Mexique, filtre migratoire
À la fin mars, environ 1 500 migrants qui ont fui leur pays à cause de la violence, ont commencé la Caravane « Viacrucis Migrante 2018 » qui a réussi à obtenir une importante couverture médiatique après avoir suscité la colère du président américain Donald Trump, qui l’a considéré comme un exemple de la faiblesse des frontières de son pays. Il a appelé à lui barrer la route, allant jusqu’à mobiliser ses troupes à la frontière. Il a aussi exprimé que « le financement de l’ALENA est en jeu, tout comme l’aide extérieure au Honduras et aux autres pays qui permettent que cette situation se maintiennent ».
En avril, le gouvernement mexicain a annoncé qu’il renforcerait les effectifs de la Gendarmerie Nationale à la frontière sud du pays mais, a-t-il assuré, en respectant son engagement de protéger les droits des migrant.es. 84 associations, collectifs et réseaux de 23 états du Mexique ont exigé l’annulation de ce plan, considérant que ce déploiement « entraînera certainement une nouvelle augmentation de la violence, de la xénophobie, et de la criminalisation des personnes migrantes et réfugiées et de ceux et celles qui les défendent, ainsi que de la population dans son ensemble ».
En mai, plusieurs réseaux et organisations de défense des populations migrantes ont exprimé leur “profonde indignation, inquiétude et étonnement face à une information (…) évoquant un accord qui ferait du Mexique une zone tampon pour les demandeurs d’asile aux États-Unis et un centre de détention migratoire”. Ils ont exigé que “les pourparlers avec les États-Unis soient suspendus (…). Les droits humains ne peuvent servir de monnaie d’échange dans aucun traité commercial”.
Élections 2018: beaucoup de choses en jeu dans un contexte de forte violence politique
La campagne présidentielle de 2018 a déjà commencé officiellement, ainsi que celle pour renouveler le pouvoir législatif fédéral, les divers congrès des états, les postes de gouverneurs et les maires. Avec 18 311 postes publics en jeu, c’est la première fois qu’autant de personnes seront élues dans le cadre d’un unique processus qui s’est aussi caractérisé par ses hauts taux de violence politique. De la fin de l’année 2017 à la mi-mai, 94 candidats de tous les partis ont été tués, 305 hommes politiques ont souffert des attaques et, entre autres raisons dues aux pressions du crime organisé, plus d’un millier d’entre eux ont au bout du compte refusé de se présenter. Guerrero a connu le plus grand nombre de meurtres avec 21 cas, suivi par le Oaxaca (16), Puebla (10), Veracruz (8) et Etat de México (7). Les attaques ont augmenté de 400% par rapport aux élections précédentes.
Andrés Manuel López Obrador (AMLO) sera le candidat présidentiel pour le Mouvement de Régénération Nationale (MORENA), le Parti Travailliste et le Parti Rencontre Sociale (PSE); Ricardo Anaya le sera pour le Parti Action Nationale (PAN), le Parti Révolutionnaire Démocratique (PRD) et le Mouvement Citoyen; José Antonio Meade, pour le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI), le Parti Ecologiste Vert du Mexique (PVEM) et Nouvelle Alliance. Jaime Rodríguez Calderón, « El Bronco », se présentera en tant que candidat indépendant. Les sondages favorisent les candidats dans cet ordre, avec une marge d’avantage relativement ample pour AMLO. En partie à cause de cela, il est devenu la cible commune des autres candidats. En mai, Margarita Zavala a annoncé le retrait de sa candidature indépendante, reconnaissant qu’elle n’avait aucune chance de gagner, et en précisant qu’elle ne déclinait pas en faveur d’un autre candidat quel qu’il soit.
D’un autre côté, en mai, le Congrès National Indigène (CNI), le Conseil Indigène de Gouvernement (CIG) et son porte-parole, Maria de Jesus Patricio Martinez, « Marichuy », ont annoncé qu’ils ne «chercheraient ni n’accepteraient aucune alliance avec un parti politique ou un candidat ». Ils ont annoncé qu’ils n’appelleront ni à l’abstention ni à la votation mais qu’ils continueront à chercher «ceux qui sont en bas de la pyramide sociale pour démonter le pouvoir de ceux qui sont en haut de celle-ci »: « Vote ou ne vote pas, organise-toi. » Ils ont partagé leurs apprentissages de la tentative d’obtention de signatures en faveur de Marichuy pour qu’elle puisse participer en tant que candidate indépendante à la présidence. Ils ont fait remarquer que « le processus électoral est une grande porcherie dans laquelle peuvent participer ceux qui trichent en forgeant des milliers de signatures et en utilisant des milliers de millions de pesos qui permettent de forcer et d’acheter les votes ».
Un peu avant, le séminaire « Regards, écoutes, paroles: Interdit de penser? » a été organisé au Chiapas par l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN) . L’objectif principal était de faire le bilan de la campagne de « Marichuy ». Le sous-commandant Galeano a affirmé que « si Marichuy a fait quelque chose, c’est de mettre à nu le système électoral mexicain. » Il a averti que les pouvoirs du système capitaliste feront tout ce qui est en leur pouvoir pour freiner la victoire d’Andres Manuel Lopez Obrador: « Le capital est prêt à jouer le tout pour tout et ne permettra ni les Lula, ni les Dilma, ni les Kirchner, ni les Correa, ni les Evo, ni López Obrador, ni aucune chose qui offrirait un certain répit ».
Droits de l’homme: rapports, dénonciations et mobilisations continuent à signaler la situation de crise
En mars, le président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) a présenté son rapport d’activité 2017 et a conclu que « le Mexique n’a pas connu de changement significatif et objectif quant à un plus grand respect et application des droits de l’homme; il n’a pas non plus réussi à renforcer considérablement notre État de droit démocratique, ni à changer le contexte auquel [en 2012] un millions de Mexicains étaient déjà confrontés, un contexte caractérisé par les binômes de l’insécurité et la violence, l’impunité et la corruption, les inégalités et la pauvreté».
Toujours en mars, le Centre mexicain pour l’environnement a présenté son « Rapport annuel sur la situation des défenseurs de l’environnement ». Il a rapporté une augmentation des agressions et «l’absence à ce jour d’une protection préventive complète et efficace de la part du gouvernement mexicain, qui est signalé comme l’un des principaux acteurs à l’origine des attaques ». Il a informé qu’entre 2010 et 2017, il y a eu 391 cas d’attaques avec une augmentation des homicides au cours de cette période. L’entité fédérale qui présente le plus grand nombre d’attaques est l’État de Mexico suivi de Oaxaca, Puebla et Chiapas.
En avril, après 4 mois pendant lequel le ministère des Affaires étrangères (SRE) a tenu en réserve le rapport du Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants des Nations Unies (SPT), les organisations de la société civile l’ont forcé à le rendre public. Ils ont indiqué que « bien que le SPT a reconnu des progrès législatifs (…), il a également réitéré que la torture est largement répandue et a confirmé que l’impunité quasi absolue qui prévaut dans ces cas encourage leur répétition. »
En mai, la Commission mexicaine pour la défense et la promotion des droits de l’homme (CMDPDH) a publié un rapport sur le déplacement interne forcé. En 2017, elle a enregistré 25 cas de déplacement massif dans neuf états mexicains, affectant 20 390 personnes. Au cours des 12 dernières années au moins 329,917 personnes ont été déplacées dans le pays, un chiffre qui reste «conservateur » parce qu’il ne comprend que les cas où des communautés entières ont été affectées. Le rapport indique que Guerrero, Sinaloa, Chihuahua, Chiapas et Oaxaca ont concentré presque tous ces cas. Le CMDPDH a signalé que ce problème reste sans diagnostic ni réponse officielle.
En mai, dans le cadre de la fête des mères, les mères de personnes disparues ont organisé une manifestation dans plusieurs villes du Mexique pour exiger des autorités qu’elles accélèrent la recherche de leurs proches, l’identification des corps localisés dans des tombes clandestines et des avancées dans les enquêtes qui permettraient de clarifier chaque cas. Le Mouvement pour nos Disparus a également demandé la « participation réelle et effective » des familles dans les instances créées de la loi sur la Disparition Forcée qui est entrée en vigueur en janvier.
Dans les notes plus positives, la Loi sur la sécurité intérieure (LSI), adoptée en décembre 2017, a été déclarée inconstitutionnelle par deux juges fédéraux qui considèrent qu’elle introduit un risque «pour l’exercice des droits fondamentaux des individus, précisément parce que l’autorité militaire peut difficilement échapper au système de commandement et de formation par lequel elle a été créée », et parce que « l’imprécision et le manque d’identité conceptuelle du terme « sécurité intérieure » contreviennent aux droits à la sécurité et la légalité juridique ». Ce sont sont les premiers recours juridiques présentés parmi les plus de 500 demandes soumises contre la LSI qui sont résolues en faveur de leurs promoteurs.
CHIAPAS: Des élections hautement compétitives
Il y a cinq candidats qui vont concourir pour le poste de gouverneur: José Antonio Aguilar Bodegas en tant que candidat du PRD-PAN-Movimiento Ciudadano; Rutilio Escandón Cadenas pour MORENA, le PT et le PSE; et Jesús Alejo Orantes Ruiz, candidat indépendant. À la fin du mois de mai, la coalition entre le PRI et le Parti Vert s’est rompue lorsque les Verts ont annoncé leur décision de nommer leur propre candidat, Fernando Castellanos Cal y Mayor, qui était jusqu’alors maire de Tuxtla Gutiérrez. Initialement, l’Institut de Participation Électorale et Citoyenne (IEPC) a refuser d’accepter sa candidature vu qu’il n’avait pas respecté l’obligation de quitter ses fonctions 120 jours avant l’élection. Cependant, le Tribunal Électoral a décidé de donner suite à la candidature du Parti Vert, Chiapas Unido et Mover a Chiapas. Roberto Albores Gleason sera quant à lui le candidat du PRI et de Nueva Alianza.
En ce qui concerne les élections municipales, en avril, le Mouvement pour la défense de la vie et du territoire (MODEVITE) a présenté le Conseil des porte-parole du gouvernement communautaire de Chilón et Sitalá, élus par le biais du système des us et coutumes. Depuis novembre dernier, il a soumis une demande avec plus de 3 000 signatures de soutien auprès de l’IEPC. En l’absence d’une réponse favorable, il a déposé un appel auprès du Tribunal électoral fédéral de Veracruz, qui a ordonné à son homologue du Chiapas de se prononcer sur la constitutionnalité de la demande.
Un autre cas a été Oxchuc. En avril, le Congrès du Chiapas a accepté que les élections municipales de juillet y seront suspendues jusqu’à ce que l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire (INAH) finalise son étude pour déterminer si les élections par le biais des us et coutumes correspondaient. Le président conseiller de l’IEPC, a reconnu que la réalisation des élections par us et coutumes « est un droit que possèdent tous les peuples autochtones du pays (…) mais pour cela ils doivent se soumettre à toutes les exigences qui sont établies par la loi ». Il a affirmé que « dans le cas de Chilón, Sitalá et Rincón Chamula, les élections constitutionnelles se tiendront par la voie du système des partis politiques parce que, dans le cas des deux premières municipalités, elles n’ont pas accrédité la représentation de leurs différents peuples; dans le troisième, l’intention du conseil municipal est de se perpétuer au pouvoir ». Il a reconnu que « depuis 1994 il y a cette demande des peuples autochtones pour que leur l’autonomie soit respectée et une partie de celle-ci passe par la possibilité d’élire leurs autorités par la voie des us et coutumes ».
Hauts Plateaux du Chiapas, un conflit qui s’étend à plusieurs municipalités
«Des groupes civils armés, présentant des caractéristiques paramilitaires et liés à des réseaux du crime organisé, attaquent des communautés à main armée, avec la permissivité et la protection de fonctionnaires du gouvernement du Chiapas. Des anciens conflits agraires sont gérés en fonction d’intérêts politiques, dans un contexte électoral et de contrôle social qui renouvellent des stratégies de contre-insurrection », a dénoncé le Centre des droits de l’homme Fray Bartolome de Las Casas face à la recrudescence de la violence dans les Hauts Plateaux en mars. Il a indiqué que depuis février, «les différentes communautés dans la municipalité d’Aldama situées dans les limites territoriales avec (…) celle de Chenalhó ont été attaqués avec des armes à feu ». Les agressions ont provoqué de nouveaux déplacements forcés et plusieurs communautés ne vont plus travailler leurs champs. Cette situation résulte d’un conflit territorial de 60 hectares entre les deux municipalités existant depuis 1977.
En mars, quatre mois après le déplacement forcé de plus de 5.000 personnes originaires des municipalités de Chalchihuitán et Chenalhó suite à un différend territorial existant depuis plus de 40 ans entre les deux municipalités, des déplacés de Chalchihuitán ont dénoncé qu’ils survivent dans des conditions inhumaines et connaissent encore la peur vu que les coups de feu n’ont pas cessé. Il y avait encore 10 camps de déplacés avec un total de 1 094 personnes en mars.
En mai, le Peuple Croyant de Simojovel a rapporté que le candidat au poste de maire pour le parti Chiapas Unido a menacé les fidèles et le prêtre, Marcelo Pérez Pérez, via Facebook dans une publication qui laisse entendre qu’il maintient une relation avec le groupe du crime organisé appelé « Los rojos ». Ils ont affirmé que « Simojovel est un reflet de ce qui se passe dans de nombreuses municipalités et ont invité toute la population du Chiapas à rester vigilante et à commencer un processus d’organisation pacifique pour que le crime organisé ne l’asservisse pas. Ne laissons pas le Chiapas se transformer en un état comme Guerrero ou Michoacán ».
OAXACA: les luttes de défense de la Terre et du Territoire se développent
En février, la deuxième Rencontre étatique des peuples, des communautés et des organisations «Nous disons oui à la vie, non aux mines» a eu lieu pour «continuer à renforcer nos processus organisationnels». On y a dénoncé «la persécution et le meurtre des défenseurs des droits de l’homme, ainsi que les stratégies de violence que les entreprises et le gouvernement ont utilisées pour générer un climat de terreur et de peur pour réduire la lutte des communautés et contrôler par le biais du crime organisé le territoire où il existe des mines ».
En mars, les autorités communautaires ont présenté le règlement intérieur de Paso de la Reyna, ejido de Jamiltepec, qui vise à protéger leur territoire, leurs biens communs ainsi que leur mode de vie et d’organisation, face à la menace de construction d’un barrage. L’article 88 stipule que «la mise en œuvre de programmes, de projets et d’investissements qui mettent en péril les biens naturels communs de l’ejido, la vie des personnes qui l’habitent, ainsi que leur intégrité, est strictement interdite».
En avril, les habitants d’Unión Hidalgo ont rejeté le début d’un processus de consultation que le Ministère de l’énergie (Sener) souhaitait promouvoir en faveur d’une filiale d’Électricité de France (EDF) qui souhaite y construire un parc éolien. Ils ont expliqué que celle-ci « ne devrait pas commencer dans un scénario de fissuration du tissu social communautaire », suite au tremblement de terre de septembre de 2017 qui a affecté 80% des maisons. Ils ont souligné le fait que le Sener a déjà accordé un permis de 30 ans à EDF en 2017, de sorte que la consultation qui doit être initiée ne respecte pas le caractère «préalable» établi dans les textes internationaux ratifiés par le Mexique sur les droits des peuples autochtones. Le Sener a décidé de suspendre la consultation indigène dans l’immédiat.
Préoccupations quant aux questions de droits de la personne
En avril, la « Caravane des oubliés », formé par 500 personnes de la Coordination Générale des victimes de l’Isthme de Oaxaca s’est rendu à Mexico pour exiger un recensement complet des personnes affectées par les tremblements de terre de septembre 2017. Le Mouvement Agraire Indigène Zapatiste (MAIZ) a déclaré que « c’est aussi une façon de dénoncer la corruption, le conditionnement politique et le manque volonté et de capacité de la part du gouvernement de l’état ».
Une autre source de préoccupation continue d’être l’impunité, origine de nouvelles agressions dans la plupart des cas. En mars, le Comité pour la défense des droits des peuples autochtones (CODEDI) a indiqué qu’il a reçu des intimidations après avoir demandé des éclaircissements sur une attaque armée qui a tué trois de ses membres en février dernier. En mai, il a dénoncé «l’échec de l’État, qui, au lieu de mener une enquête sérieuse pour trouver les auteurs matériels et intellectuels, les récompense en leur donnant des postes publics ; ils font traîner l’affaire et donnent la priorité à leur farce électorale ».
En avril, le président du Comité des victimes de Nochixtlan (Covic) a été retrouvé dans sa maison, attaché et montrant des signes évidents de torture après avoir été attaqué par des inconnus. La Coordination Nationale des Travailleurs de l’Éducation (CNTE) a rendu responsable de l’attaque «les gouvernements municipaux et de l’état, qu’il a également accusé d’empêcher la poursuite de l’enquête sur les événements violents du 19 juin 2016, cadre dans lequel huit personnes sont mortes et plus de 100 ont été blessés », ceci suite à la répression policière contre le mouvement des enseignants.
En avril, l’ombudsman de Oaxaca a affirmé avoir présenté auprès de la Cour pénale internationale un recours contre les anciens présidents Vicente Fox et Felipe Calderon, l’ancien gouverneur du Oaxaca, Ulises Ruiz et une douzaine de hauts fonctionnaires pour crimes contre l’humanité dans le cadre du conflit politique et social de 2006 et 2007. Il a dénoncé que les actions du gouvernement suivaient un « modèle systématique et généralisé (…) faisant partie d’une stratégie pour contenir les manifestations sociales ». Il a fait état de crimes graves, en particulier de meurtres, de tortures et de disparitions forcées qui, 12 ans plus tard, « restent impunis ».
GUERRERO: « un peuple crucifié »
Dans un article intitulé « un peuple crucifié » en avril, le Centre des droits de l’homme Tlachinollan a dénoncé la grave situation dans laquelle se trouve le Guerrero en affirmant que « les forces de police, de la marine et de l’armée, ne constituent aucune garantie pour une population qui se méfie d’elles, parce que leurs actions ne génèrent pas à une plus grande sécurité. Au contraire, le nombre de morts violentes a augmenté, bien que l’on ait augmenté le nombre de troupes dans les municipalités les plus violentes de l’état. Ce fléau n’est qu’une partie du calvaire vécue par les habitants du Guerrero. Les statistiques officielles qui nous situent comme le deuxième état le plus pauvre nous montrent un état qui a été gouverné par des groupes politiques qui ont utilisé les institutions pour leur propre bénéfice ».
L’affaire des 43 élèves disparus de l’école normale rurale d’Ayotzinapa en 2014 reste sans avancées. En mars, le Haut-Commissaire pour les droits de l’homme des Nations Unies a présenté le rapport intitulé « Double injustice » qui analyse les enquêtes effectuées dans cette affaire. Parmi les 129 personnes qui ont été arrêtées, il a trouvé de « forts éléments de conviction quant à la commission d’actes de torture, de détention arbitraire et d’autres violations des droits de l’homme ». Il a exhorté le gouvernement à traduire en justice les responsables de ces abus, ainsi que leurs supérieurs. Il a également appelé à rejeter les preuves obtenues sous la torture. En mai, les parents des 43 disparus et leurs représentants légaux ont averti que le gouvernement a l’intention de clore l’enquête avant l’arrivée d’un nouveau président. « Ce que nous cherchons, c’est que l’affaire Ayotzinapa soit considéré dans un contexte de plus de 30 mille personnes disparues au Mexique au cours des six dernières années. Et ce que nous affirmons c’est qu’Ayotzinapa est un exemple clair de ce phénomène de macro-criminalité dans lequel il existe un lien évident entre le crime organisé et le gouvernement, au point de se transformer en une même entité » , a déclaré le Centre des droits de l’homme Miguel Agustin Pro Juarez .
Deux cas récents continuent d’alimenter la préoccupation concernant la protection des défenseurs des droits de l’homme au Guerrero. En mars,Maria Luisa Ortiz Arena, membre du réseau étatique d’activistes féministes, a été assassinée. Le bureau du procureur général enquêtera sur son décès en fonction du protocole de féminicide. Au Guerrero, au moins 40 féminicides ont été enregistrées cette année mais le protocole d’enquête n’a pas été suivi et l’impunité persiste, ont dénoncé des organisations de femmes.
D’autre part, dans le cadre du procès de 25 membres du Conseil des ejidos et des communautés opposés au barrage de La Parota (CECOP) et la Coordination Régionale des Autorités Communautaires Police Communautaire (CRAC-PC), arrêtés en janvier 2018 à La Concepción, des audiences ont eu lieu en avril pour vérifier les conditions de leur emprisonnement. Le juge qui a examiné l’affaire a décidé de respecter les droits à des conditions adéquates des dits prisonniers. Plusieurs organisations de la société civile ont souligné que les affrontements de janvier « étaient dus à la tension intercommunautaire promue par des acteurs étatiques et privés pour freiner la défense du territoire de leur communauté et de la rivière Papagayo contre la construction du barrage hydroélectrique de La Parota » ; et que « plusieurs membres de CECOP ont déjà fait l’objet autant de l’utilisation politique du système de justice pénale, que d’attaques à leur encontre depuis 2003 ».