Activités du SIPAZ (De mi-mai à mi-août 2021)
23/09/2021DOSSIER : Violence, comme une marée de pleine lune au Chiapas
20/12/2021E n septembre, le président Andrés Manuel López Obrador (AMLO) a présenté son troisième rapport gouvernemental dans lequel il a abordé la situation des droits humains. Bien qu’il ait déclaré que « les droits de l’homme ne sont pas bafoués » au Mexique, plusieurs organisations civiles ont contredit ses déclarations. Dans son rapport 2020, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) a présenté 11 387 plaintes pour violations des droits humains, commises par différentes institutions publiques. Human Rights Watch (HRW) a souligné qu’avec la mobilisation des forces armées pour réaliser des tâches d’ordre public, de contrôle douanier, de contrôle et de gestion des migrations et de développement de mégaprojets, les abus militaires se sont multipliés. HRW a affirmé que « les violations des droits humains – y compris la torture, les disparitions forcées, les abus contre les migrants, les exécutions extrajudiciaires et les attaques contre des journalistes indépendants et des défenseurs des droits humains – se sont poursuivies pendant le gouvernement d’Andrés Manuel López Obrador ». « Seul 1,3% des crimes commis au Mexique sont résolus », a déclaré pour sa part l’organisation Impunidad Cero. Le Centre des droits de l’Homme Miguel Agustín Pro Juárez (Centro Prodh) a exprimé : « sans aucun doute, le gouvernement fédéral a promu des actions qui vont dans le bon sens (…) mais de là à affirmer qu’au Mexique il n’y a plus de violations des droits humains il y a une distance qui transite de la vérité au mensonge ».
Disparition forcée : un dossier en souffrance
Dans le cadre de la Journée internationale des victimes de disparitions forcées (en août), des organisations et groupes civils ont mené des actions pour rendre visible la gravité de la situation au Mexique et exiger des autorités qu’elles garantissent la recherche effective des personnes disparues. Selon la Commission Nationale de Recherche (CNB), le nombre de personnes disparues au Mexique est passé à 94 939 de cas (entre 1964 et novembre 2021).
Dans les aspects positifs, en octobre, un décret a créé la Commission pour l’accès à la vérité et la promotion de la justice pour les violations graves des droits de l’Homme commises entre 1965 et 1990. Pendant cette période appelée la « sale guerre », des crimes de disparition forcée, des actes de torture et des exécutions extrajudiciaires de personnes appartenant à des mouvements ou à des organisations remettant en cause les politiques de l’État ont été commis. La Commission aura pour mission d’enquêter, de superviser et de publier des rapports relatifs aux violations des droits de l’homme au cours de cette période.
Défenseurs, journalistes, femmes et mineurs : parmi les secteurs les plus vulnérables
En octobre, le Ministère de l’Intérieur a annoncé que 47 journalistes et 94 défenseurs des droits humains ont été assassinés depuis le début du gouvernement d’AMLO. Il a rapporté que dans les affaires de meurtres de journalistes, il n’y a eu de condamnations que dans 5 cas. Les états qui comptent le plus grand nombre d’activistes assassinés sont le Guerrero, le Oaxaca et le Chiapas.
En octobre, des organisations civiles ont dénoncé devant la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) la répression et la stigmatisation des manifestations féministes. Ils ont souligné « l’usage abusif de la force, les violences sexuelles, les agressions physiques et le harcèlement numérique ». Les plaintes portaient également sur des lois restrictives et criminalisant la protestation sociale ; la militarisation et l’usage de la force dans ce contexte ; la violation du droit de se réunir pacifiquement et de la liberté d’expression. De plus, ils ont rendu visibles les discours stigmatisants utilisés pour discréditer ces mouvements. En septembre, par exemple, AMLO a déclaré que « le féminisme mexicain est devenu directement un mouvement d’opposition » à son gouvernement.
En août, le sous-secrétaire aux droits de l’Homme et aux migrations, Alejandro Encinas, a présenté une étude sur l’impact de la pandémie sur les enfants. Il a signalé que 5,2 millions d’élèves ne se sont pas inscrits à l’école en raison de causes liées à la pandémie ou au manque de ressources. Il a également mentionné la diminution de la proportion d’enfants et de jeunes qui entrent pour la première fois dans le système scolaire. Par contre, entre mars et juin 2021, des niveaux maximaux historiques ont été enregistrés en matière de violence familiale. « Les petites filles, les petits garçons et les adolescent.e.s souffrent de violence psychologique, sexuelle, physique, économique et d’abandon ou de négligence au sein de leur foyer », a rapporté le sous-secrétaire. Le rapport montre que pendant la pandémie, il y a eu 273 661 naissances de bébés de mères adolescentes ; 4 401 homicides de mineurs entre 2018 et 2020 ; et le suicide a augmenté de 12 % dans ce groupe d’âge.
MIGRATION : « L’exode de la pauvreté » traverse le Mexique
En octobre, la caravane des migrants « pour la dignité, la liberté et la paix » a commencé au Chiapas, pour « témoigner de la criminalisation subie » par les personnes en mobilité migratoire. Plus de 4 000 migrants constituaient le contingent, dont des femmes enceintes et plus d’un millier d’enfants, ainsi que des personnes handicapées.
D’autre part, des organisations, réseaux et collectifs du Mexique et d’Amérique centrale ont lancé la campagne #ProtectionPasContention pour mettre fin à la répression, au confinement et à l’expulsion de personnes en mouvement. « Au cours des trois dernières années, le gouvernement mexicain a participé avec le gouvernement américain à des actions visant à limiter la protection des migrants et des demandeurs d’asile, en externalisant les frontières des États-Unis, en militarisant la politique d’immigration mexicaine et en criminalisant ceux qui demandent protection », ont-ils souligné. Ces personnes sont obligées de quitter leur pays parce qu’il n’y a pas de conditions qui leur permettent d’y construire une vie décente, ont-ils approfondi. L’absence de réponse des autorités de l’immigration et de l’asile au Mexique a laissé dans les limbes les migrants à la frontière sud, principalement des personnes en provenance d’Haïti, du Venezuela et d’Amérique centrale. Elles sont restées à cet endroit pendant plus d’un an sans possibilités d’emploi, sans accès à la santé et sans éducation. Lorsqu’elles ont cherché à aller plus loin à l’intérieur du Mexique à la recherche de conditions minimales pour une vie digne, elles ont été réprimées et détenues par des agents de l’Institut National des Migrations (INM) et de la Garde nationale.
MILITARISATION : des inquiétudes qui se maintiennent
En août, Amnesty International et le collectif Sécurité sans guerre ont réaffirmé qu’« il est urgent que le gouvernement mexicain mette fin à la participation de l’armée aux tâches de sécurité publique ». Ils ont rappelé que la militarisation a déclenché une augmentation des violations graves des droits humains. Bien que la réforme proposée par AMLO pour que la Garde nationale (GN) fasse partie du Ministère de la Défense Nationale (Sedena) n’ait pas encore été approuvée, « des documents officiels confirment le contrôle militaire qui, en fait, existe déjà sur cette corporation de police », ont-ils dénoncé. Les analystes estiment qu’à l’heure actuelle, la GN est « composée de 50 % de policiers militaires de la SEDENA, 10 % de policiers navals du Ministère de la Marine (SEMAR), 20 % de membres de la Police fédérale, et 17 % de nouveaux recrus embauchés par SEDENA et SEMAR, formés dans des bases militaires ».
Sa participation à des opérations migratoires est particulièrement préoccupante car « elle a eu un effet grave sur la sauvegarde des Droits de l’Homme de la population en mobilité migratoire ». À cet égard, le Ministre de la Défense Nationale, Luis Cresencio Sandoval, a déclaré lors de sa visite au Chiapas en août que les forces armées venaient d’achever « une série d’opérations » à la frontière sud avec la participation de plus de 14 000 éléments. Pour la période de juin 2019 à décembre 2020, 193 640 migrants ont été présentés auprès des autorités migratoires. Les spécialistes estiment que « plus de 78 % des arrestations de migrants au Mexique au cours de cette période ont été effectuées par des militaires ou des éléments de la Garde nationale ».
CHIAPAS : Aggravation de la violence
Plusieurs moments de violence ont été enregistrés au Chiapas ces derniers mois (voir Dossier). À San Cristóbal de las Casas, le Centre des droits de l’Homme, Fray Bartolomé de las Casas, a déclaré que on leur rapporte « quotidiennement des coups de feu avec des armes de gros calibre et des affrontements entre groupes armés sans que les autorités municipales et étatiques n’agissent ». En octobre, le journaliste et chroniqueur Fredy López Arévalo a été assassiné dans la rue devant son domicile dans cette même ville.
En octobre, Dayli de los Santos Herrera Gutiérrez a été arrêté, comme l’auteur intellectuel présumé du meurtre du procureur de la justice indigène, Gregorio Pérez Gómez, en août. Ce dernier était chargé des enquêtes sur les violences à Pantelhó. De los Santos et son frère sont désignés par le groupe d’autodéfense El Machete comme commandants d’un « groupe criminel » appelé « Los Herrera », qu’ils accusent d’au moins deux cents homicides commis à Pantelhó en collusion avec le gouvernement municipal du PRD. En novembre, le Congrès de l’État a destitué le président municipal élu, Raquel Trujillo Morales (également du PRD), après qu’une enquête ait été ouverte contre lui pour le meurtre d’une personne en juillet de cette année.
En octobre, le Réseau Tous droits pour tous (Red TdT) a exigé que les agressions contre le refuge pour migrants « Casa Betania Santa Martha » à Salto de Agua cessent. Un groupe de personnes armées est entré dans le refuge en menaçant les personnes présentes. Il a expliqué que c’est la troisième fois cette l’année que ce type d’agression se produit et que cela s’est présenté dans un contexte où d’autres organisations qui défendent les droits humains des migrants sont également harcelées. À la mi-septembre, la Casa del Caminante Jtatic Samuel Ruiz García, située à Palenque, a fermé ses portes en raison de menaces.
Parallèlement, des groupes d’autodéfense sont apparus. Le premier était El Machete, créé en raison de la crise politique et sécuritaire à Pantelhó. Le second, appelé « Peuple de la Jungle », a fait son apparition en septembre, lorsqu’il a exprimé son soutien à El Machete. En octobre, les « Forces armées de Simojovel » ont exigé, entre autres, « 1. Respect de nos revendications indigènes, 2. Plus de détournement de fonds destinés à la population, 3. Nous ne permettrons plus les tueurs à gages ou les trafiquants de drogue armés ». Toujours en octobre, un groupe supposé d’autodéfense est apparu à Altamirano, où un fort conflit post-électoral a été généré pour empêcher la prise de pouvoir de la candidate élue Gabriela Roque Tipacamú, épouse de Roberto Pinto Kanter, tous deux accusés de vouloir continuer avec leur contrôle de la mairie (depuis 2002), dans cette commune.
Manifestations et criminalisation
En octobre, un an après la répression de la manifestation contre l’installation d’une caserne de la GN à Chilon, des proches et des habitants ont demandé l’arrêt des poursuites pénales contre César Hernández Feliciano et José Luis Gutiérrez Hernández. Ils ont été arrêtés, accusés d’émeute, après avoir participé à une manifestation contre la construction de ladite caserne, pour ensuite être torturés, arbitrairement privés de leur liberté et détenus au secret. Leur défense a déposé une série d’appels en justice, mais tous ont été rejetés. Par ailleurs, il faut rappeler qu’en novembre 2020, les communautés Maya-Tseltal ont déposé un recours constitutionnel contre la construction de la Caserne (puisqu’une consultation libre, préalable et culturellement appropriée n’a pas été réalisée). À ce jour, ce recours n’est toujours pas résolu.
En octobre, des organisations civiles ont dénoncé que, depuis plus de 10 ans, elles mènent différentes actions pour contrer l’impact environnemental qui afflige les zones humides de San Cristóbal de Las Casas. Elles ont souligné l’omission des autorités qui « ne mettent pas en œuvre des mesures urgentes et efficaces ». Elles espèrent qu’avec l’entrée de la nouvelle administration municipale 2021-2024, « la question sera remise sur la table et saisie comme l’occasion de faire quelque chose ».
Le 1er novembre, des groupes de femmes et de proches de victimes de féminicides ont organisé la « Marche des Catrinas » à San Cristóbal de las Casas, Comitán et Tuxtla Gutiérrez pour demander justice et rendre visible la violence contre les femmes. L’Observatoire féministe contre la violence à l’égard des femmes du Chiapas rapporte que, de 2016 à 2020, « il y a eu plus de 900 morts violentes de femmes ». « Nous avons identifié la résistance du bureau du procureur, à enquêter depuis une perspective de genre, ce qui est essentiel pour clarifier les faits, accéder à la vérité et à la justice », ont conclu les manifestants.
Agressions dans les territoires zapatistes pendant le “Voyage pour la vie”
La délégation zapatiste « Escadron 421 » est rentré au Mexique en septembre, après avoir visité plusieurs pays européens pendant plus de 4 mois, où elle a exposé son combat et fait connaissance avec celui de divers groupes sociaux et populaires. Elle a été suivie par la délégation aérienne “La Extemporánea”, composée de 177 membres ainsi qu’une délégation du Congrès National Indigène (CNI). Entre l’Escadron 421 et La Extemporánea (qui n’est pas encore revenu), l’itinéraire zapatiste à travers l’Europe englobera une trentaine de pays.
Pendant ce temps, au Chiapas, en septembre, le Réseau de résistance et de rébellion AJMAQ a dénoncé que des membres de l’Organisation Régionale des producteurs de Café d’Ocosingo (ORCAO) avaient détenu deux membres du Conseil de Bon Gouvernement (JBG) Patria Nueva, municipalité d’Ocosingo. AJMAG a souligné que « l’ORCAO a perpétré une série d’actions criminelles contre les bases de soutien de l’EZLN de la communauté autonome Moisés Gandhi depuis plusieurs mois. Les actes les plus ignobles étant ceux enregistrés depuis août 2020, où le pillage, le braquage, la destruction et l’incendie du magasin coopératif autonome El Arco Iris ont été perpétrés de manière violente, ainsi que l’enlèvement de Félix López Hernández le 8 novembre 2020 et de deux membres du Centre des droits de l’homme Fray Bartolomé de Las Casas le 12 avril de cette année ». Il a estimé que « cette escalade de la violence orchestrée depuis les hauts pouvoirs du gouvernement fédéral s’inscrit dans le cadre de l’initiative de l’EZLN Voyage pour la Vie – Chapitre Europe, qui cherche à étendre, de manière pacifique et créative, le germe de la résistance et la rébellion en faveur de l’humanité et de la terre mère, c’est-à-dire de la vie ».
L’EZLN s’est prononcée sur la libération des deux membres du JBG, en soulignant l’inaction du gouvernement, qui « dissimule et encourage ces crimes » et entretient « des alliances avec les groupes de trafic de drogue qui obligent les communautés indigènes à former des groupes d’autodéfense”. Qui plus est, il “promeut et finance des groupes paramilitaires tels que ceux qui attaquent continuellement les communautés d’Aldama et de Santa Martha ». Dans le communiqué « Le Chiapas au bord de la guerre civile », l’EZLN a également évoqué la lenteur de la campagne de vaccination, les obstacles cherchant à freiner le départ de la délégation zapatiste vers l’Europe et la permanence des mêmes cadres dans différents partis politiques, entre autres aspects.
OAXACA : Les agressions contre les défenseurs des droits humains se multiplient
En août, l’Union civique démocratique des quartiers, des colonies et des communautés (Ucidebacc) a dénoncé que son chef, Antonio Zarate Bernal, avait été kidnappé puis retrouvé « avec de multiples coups et des traces de torture ». Elle a dénoncé la répression persistante qui perdure depuis plusieurs années et a rappelé qu’Antonio Zarate Bernal avait été arrêté en 2011 et libéré deux mois plus tard faute de preuves l’inculpant. L’arrestation aurait à voir avec « la criminalisation menée par l’État mexicain (…) qui a malicieusement utilisé la justice mexicaine pour monter des dossiers de crimes préfabriqués ».
En septembre, José Castillo Castro, défenseur des terres et du territoire de la communauté Chontal de Barra de la Cruz, dans la municipalité de Santiago Astata, a été hospitalisé après avoir reçu deux coups de feu lors d’une attaque menée par deux personnes qui circulaient à bord d’une moto. Le Centre pour les droits humains et le conseil aux peuples autochtones (CEDHAPI) a demandé que cette attaque fasse l’objet d’une enquête, tout en soulignant l’augmentation des attaques contre les défenseurs des droits humains et les journalistes.
Le Front Non à l’exploitation minière pour un avenir pour Tou.te.s a dénoncé que les autorités municipales et agraires qui composent le Front avaient reçu des menaces de la part de personnes qui prétendaient se présenter armés « pour empêcher la manifestation et identifier les manifestants”, ceci lors de la mobilisation organisée en octobre pour demander l’annulation du projet minier de San José, exploité par Fortuna Silver Mines. « Notre action de mobilisation est pacifique, conforme à la loi, dans le cadre constitutionnel et dans le respect des accords de notre assemblée générale pour interdire les activités minières », ont-ils rappelé.
En novembre, le bureau du procureur général a émis une “alerte rose” face à la disparition de l’écologiste Irma Galindo Barrios. La défenseure des forêts du peuple Ñuu Savi était à Mexico pour collecter de la nourriture en faveur des communautés de la municipalité de San Esteban Atatlahuca, ces dernières ayant été attaquées par un groupe armé fin octobre après avoir dénoncé la déprédation de leurs ressources naturelles. Ces événements avaient fait un mort, quatre disparus, des dizaines de maisons incendiées et environ 300 déplacés. L’écologiste avait déjà été victime de diffamation, de harcèlement et de menaces depuis 2019.
Dans les avancées, en septembre, l’Assemblée des peuples de l’isthme pour la défense de la terre et du territoire (APIIDTT) a rendu compte de la victoire juridique des communautés zapotèques contre le projet éolien Gunaa Sicarú de la multinationale Électricité de France (EDF) qui implique un investissement de 6 milliards de pesos et une superficie de 4 700 hectares de terres louées. Elle a expliqué qu’en septembre, un tribunal avait accordé la suspension pure et simple du projet d’EDF, qui ne pourra effectuer aucun travail tant que le procès en sera pas terminé. L’année dernière, l’APIIDTT avait présenté un recours constitutionnel car les membres de la communauté n’ont pas donné leur autorisation pour la mise en œuvre du projet.
En novembre, la Cour Suprême de Justice de la Nation (SCJN) a approuvé à l’unanimité le projet de sentence en faveur de la défense des Chimalapas. Ceci se produit neuf ans après la présentation d’un recours constitutionnel contre la création de la municipalité de Belisario Domínguez par le gouvernement du Chiapas, qui impliquait l’invasion d’environ 84 000 hectares du territoire de Oaxaca. Le Comité national pour la défense et la conservation des Chimalapas, a estimé que ce résultat favorise le Oaxaca, mais en particulier les habitants des Chimalapas, qui se sont battus pour défendre leur territoire dans un conflit qui a été utilisé par les éleveurs, les bûcherons et les trafiquants de drogue pour déboiser et envahir leurs territoires.
GUERRERO : entre violence et pauvreté
Le 1er octobre, au Guerrero, comme dans d’autres états, plusieurs municipalités ont reçu leurs nouveaux maires. Nombre d’entre eux se sont retrouvés face à de graves problèmes : manque d’eau, absence de police municipale, travaux inachevés et mal exécutés, dettes impayées, troubles et manifestations dus à des engagements non tenus, a écrit le Centre des droits de l’Homme de la Montagne Tlachinollan. Le Guerrero est l’un des états où « l’intervention du crime organisé est devenue encore plus évidente » lors des élections de juin. En menaçant les candidats et/ou leurs familles, les groupes criminels les ont forcés à renoncer à leur intention de gouverner et dans d’autres cas, ils ont imposé à tel ou tel candidat, a déclaré Tlachinollan.
Plus tard, le président López Obrador a visité le Guerrero. En compagnie de la nouvelle gouverneure Evelyn Salgado, ils ont visité plusieurs communautés. « La revendication des communautés indigènes et afro-mexicaines s’articule autour d’éléments de base pour une vie digne : santé, éducation, logement, routes et réactivation de la campagne », a déclaré Tlachinollan. Le grave problème de la violence était également présent : la prolifération des groupes armés et le manque d’accès à la justice pour les femmes victimes de violence. Tlachinollan a reconnu que, malgré les programmes mis en place par le gouvernement fédéral, les familles de la Montagne « n’ont pas pu franchir le seuil de l’extrême pauvreté » et que cette visite a suscité de nombreuses expectatives lorsque les deux dirigeants « se sont engagés à prioriser les régions et les états pauvres ». Cependant, il a dit qu’au niveau municipal, les intérêts sont différents, notamment en raison de la corruption et de la mauvaise gestion des ressources qu’ils utilisent « comme leur propre patrimoine ».
Un autre problème lié à la violence dans l’état a été le déplacement forcé. Depuis septembre, une commission de familles déplacées des municipalités de Leonardo Bravo et Zitlala, maintient un sit-in devant le ministère de l’Intérieur à Mexico pour exiger le respect des engagements pris en avril. Lors d’une réunion interinstitutionnelle, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), a promis qu’en coordination avec la Commission exécutive d’attention aux victimes (CEAV), elle reconnaîtrait le statut de victime des familles déplacées ; et le personnel gouvernemental a promis de trouver des lieux sûrs pour leur réinstallation en raison de l’impossibilité de revenir chez eux. Jusqu’à présent, aucun progrès n’a été réalisé sur aucun de ces aspects.
Concernant l’impunité, à l’occasion du septième anniversaire de la disparition des élèves de l’école normale rurale d’Ayotzinapa à Iguala, des activités ont été organisées pour exiger justice et vérité. Des proches des normalistes ont critiqué « la réticence » du gouvernement dans l’enquête, et « la lenteur » du parquet : quarante mandats d’arrêt n’ont pas encore été exécutés et aucune enquête n’a été ouverte contre les éléments du 27e bataillon d’infanterie signalés pour leur possible participation. L’ONU-DH a déclaré que « des progrès pertinents ont été accomplis » mais qu’il est « de la plus haute importance de transformer les progrès réalisés en actions concrètes qui visent à briser le pacte du silence (…) pour connaître la vérité sur ce qui s’est passé. »
En octobre, deux mois après la disparition de Vicente Suastegui Muñoz, frère du leader du mouvement d’opposition au barrage hydroélectrique de La Parota, Tlachinollan a déclaré qu’il n’y avait aucun progrès dans l’affaire, ceci en dépit de l’identification des personnes ayant participé à sa disparition. Il a indiqué que des plaintes formelles ont été déposées contre lesdites personnes ; ainsi que contre la police du Guerrero et la Marine, « parce que quelques jours avant sa disparition, il a été privé de sa liberté soit disant parce qu’il portait une arme, ce qui n’a pas pu être prouvé ». Malgré cela et les tentatives de recherche, le parquet général du Guerrero n’agit pas avec « toute la force des institutions ». Acapulco et Iguala connaissent une crise sécuritaire où les autorités « ne font rien pour démanteler la structure criminelle ».