ACTUALITE: Mexique – victoire indiscutable de la coalition “Ensemble, nous ferons l’histoire” aux élections du premier juillet
02/10/2018DOSSIER : MEXIQUE – Attaques contre la liberté d’expression
14/12/2018Depuis le 19 octobre, des milliers de migrants -y compris des mineurs, des femmes et des personnes âgées- ont commencé à entrer au Mexique en caravanes dans le but d’atteindre les États-Unis (voir article).
Plusieurs organisations présentes à la frontière sud affirment qu’il s’agit un “exode” qui crée une urgence humanitaire face à laquelle « il n’existe pas de coordination entre les différentes instances de gouvernement (…) pour donner une réponse intégrale et régionale à la situation ». Ces caravanes ont provoqué la colère du président des États-Unis, Donald Trump, qui a appelé les pays d’Amérique Centrale et le Mexique à faire tout ce qui serait nécessaire pour les en empêcher, menaçant même de suspendre son soutien financier.
Au début, les autorités mexicaines ont dépêché la police fédérale à la frontière sud pour accompagner une opération de l’Institut National de Migration. Une semaine plus tard, le président du Mexique, Enrique Peña Nieto, a annoncé un programme de prise en charge des migrants intitulé « Vous êtes chez vous », qui fournira des soins médicaux, accès à l’éducation, un emploi temporaire et une identification aux personnes récemment entrées par la frontière sud. Certaines restrictions ont cependant été établies: ceux qui souhaitent recevoir ce programme doivent être au Oaxaca ou au Chiapas, et avoir enregistré leur entrée au Mexique ou leur demande d’asile. « 99% des membres de la caravane ont rejeté cette offre car elle se limite au Chiapas et au Oaxaca, des états qui se caractérisent par des conditions similaires à celles des pays dont nous sommes originaires », a déclaré l’organisation Pueblos Sin Fronteras.
À la mi-novembre, les premiers contingents ont commencé à arriver à Tijuana. Même s’ils ont atteint la frontière, l’incertitude persiste car, pour obtenir le statut de réfugié du fait de la situation critique dans leur pays d’origine, ils doivent franchir la frontière par un accès officiel, conformément à un décret signé la semaine précédente par le président Donald Trump. S’ils ne respectent pas ce critère, les migrants seront arrêtés, ce qui les empêchera de rester dans le pays ou de demander asile par la suite. Les États-Unis ont également annoncé l’opération “Faithful Patriot” (Patriote Fidèle), par le biais de laquelle ils déploieront 5 200 soldats à la frontière avec le Mexique. Le Ministre de l’Intérieur mexicain, Alfonso Navarrete Prida, a déclaré que les possibilités des migrants d’entrer aux États-Unis sont « pratiquement nulles » et a assuré que le gouvernement mexicain cherchera à les empêcher de pénétrer de force dans le pays voisin.
Changement et continuité durant la phase de transition entre deux gouvernements
En septembre, le président Enrique Peña Nieto (EPN) a présenté son dernier rapport de gouvernement. Il a affirmé laisser derrière lui un pays ”prospère et stable” après avoir couvert ”99% de ses promesses de campagne”. En ce qui concerne la lutte contre le crime organisé, il a reconnu que ”ce gouvernement a réussi à réduire la capacité opérationnelle des organisations criminelles. Mais ce même affaiblissement a entraîné l’apparition de gangs criminels plus petits, sans que la police locale ne soit en mesure de répondre à ce nouveau défi”. Selon le journal numérique Sin Embargo, EPN n’a cependant tenu que 49,50% de ses promesses: ”Les travaux d’infrastructure laissés en plan, de même que les projets visant à rétablir la sécurité dans toute la géographie mexicaine ou la construction du système national de lutte contre la corruption. (…) Le gouvernement sur le point d’expirer a battu un record historique en obtenant le pourcentage d’approbation le plus bas (…) des 30 dernières années”.
Le président élu, Andrés Manuel López Obrador (AMLO), et son futur gouvernement ont été omniprésents dans les médias depuis les élections. Ces derniers ont couvert leurs déclarations sur les décisions et projets qu’ils souhaitent mettre en œuvre une fois au pouvoir. Ils ont envoyé des signaux contradictoires et parfois opposés à des déclarations présentées durant la campagne électorale. Les déclarations plus récentes et certaines nominations à des postes clés du futur gouvernement montrent clairement qu’il n’y aura pas de changements structurels importants dans le modèle socio-économique qui a prévalu au cours des dernières décennies.
En août, AMLO a annoncé que son gouvernement poursuivrait la politique qui, depuis 2006, utilise les forces armées pour réaliser des tâches de sécurité publique face à ”la dure réalité” de la violence dans le pays. Il a affirmé que ”dans les circonstances actuelles, il n’y a pas d’alternative” et que ce serait ”irresponsable” car cela laisserait la population ”sans défense”. Il a ajouté que son gouvernement chercherait à retirer les forces armées progressivement , mais qu’ ”aucun changement ne sera apporté à la loi actuelle sur la sécurité publique, tant qu’il n’y aura pas de résultats”.
Le collectif #SeguridadSinGuerra a dénoncé que ”d’une part, des forums pour la paix et la réconciliation sont organisés dans tout le pays et que, d’autre part, des fragments du discours que nous avons écouté au cours de presque 12 années de guerre se répètent”. Il a également affirmé que ”l’absence d’engagement afin d’abroger la loi sur la sécurité intérieure, (…) accroît l’incertitude quant à la volonté réelle du prochain gouvernement de mettre fin à la militarisation”.
En novembre, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) a demandé à la Cour Suprême de Justice de la Nation (SCJN) de déclarer inconstitutionnelle la dite loi, en soulignant que la participation des forces armées aux tâches de sécurité publique ”n’était pas la solution pour faire face à la quantité de délits(…) Les réponses qui devraient être privilégiées sont la formation des officiers de police; le renseignement financier et des enquêtes patrimoniales; le renforcement de la prévention, comme par exemple l’attention face aux inégalités, en privilégiant et en renforçant l’exercice des droits sociaux, ainsi que le suivi du trafic d’armes”. La SCJN a finalement rejeté la loi dans son intégralité.
Cependant, le « Plan national pour la paix et la sécurité 2018-2024 » du président élu a pour principale nouveauté la création d’une garde nationale, composée de 120 à 200 mille éléments. Dès que ce plan a été présenté, les organisations de défense des droits de l’homme ont commencé à le remettre en question. Amnesty International a estimé que ce plan était “inquiétant”, dans la mesure où il ”reprend essentiellement le modèle de sécurité militaire qui n’a pas fonctionné”.
Le risque de « banalisation » des processus de consultation
Comme déjà mentionné, AMLO a proposé de mettre en place 43 forums de consultation pour établir les bases des politiques de pacification à mettre en place, notamment la légalisation de certaines drogues, l’amnistie de certains crimes et la définition du futur rôle de l’armée. Plusieurs organisations de victimes et de défense des droits de l’homme se sont déclarées préoccupées face au risque que les participants soient revictimisés ou menacés, ou qu’ils servent à légitimer un agenda préétabli.
D’autres thèmes ont également été soumis à consultation. En octobre, AMLO a annoncé qu’il annulerait la construction du nouvel aéroport international de Mexico à Texcoco et qu’il soutiendrait le projet situé dans l’actuelle base militaire de Santa Lucía. Ceci après une consultation nationale à laquelle plus d’un million de personnes ont participé. EPN a annoncé que son gouvernement poursuivrait la construction à Texcoco jusqu’au dernier jour de son mandat. Des hommes d’affaires et les partis d’opposition du Mouvement de Régénération Nationale (MORENA, parti politique d’AMLO) ont remis en cause la proposition de Santa Lucia et le processus de consultation qu’ils considèrent illégal et sans caractère contraignant. Pour eux, il s’agit d’une simulation pour appuyer une décision déjà prise par AMLO. Ils estiment aussi que cela aura un impact négatif sur les marchés financiers et générera de lourdes pertes économiques.
De leur côté, le Congrès National Indigène (CNI) et l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN) ont rejeté la construction d’un nouvel aéroport, quel que soit son emplacement: “Décider où placer le nouvel aéroport ne devrait pas être ce que nous demandent ceux qui sont au pouvoir. S’ils ont eu un peu de dignité face aux millions de personnes qui souffrent de la dépossession, de la pauvreté, de la répression, face à ceux qui doivent émigrer par milliers devant la destruction qui existe dans le monde entier, devant notre Terre Mère ne supportant plus la maladie grave que le capitalisme représente, la question devrait être de savoir si nous sommes d’accord pour dire qu’ils continuent ou non sur cette voie qui nous mène tous à la mort, à la guerre, à l’extermination”.
En octobre, il a été annoncé qu’une autre consultation serait organisée sur la création de l’Institut National des Peuples autochtones et afro-mexicains. Par la suite, AMLO a également annoncé qu’en novembre le projet de train Maya ferait aussi l’objet de consultations, de même que les raffineries de Tabasco et du Oaxaca, ainsi que d’autres programmes sociaux.
Le chercheur Francisco López Cárdenas s’est interrogé sur la tendance à banaliser le droit des peuples autochtones à la consultation: « Si, dans les gouvernements précédents, (…), le schéma récurrent face au droit des peuples autochtones à la consultation était de l’ignorer, il semble que le prochain gouvernement en tiendra compte certes, mais en dehors des cadres normatifs internationaux. II ne le fera que pour légitimer des actes gouvernementaux déjà décidés à l’avance « .
« Défis considérables » en matière de droits de l’homme
En novembre, dans le cadre de l’Examen Périodique Universel (EPU) du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, des représentants de 108 pays ont posé des questions et formulé des recommandations au Mexique sur ce sujet. La délégation du gouvernement mexicain a reconnu que des ”défis considérables” persistaient quant à la protection des défenseur.e.s des droits de l’homme et des journalistes, la torture, les disparitions forcées, la violence contre les femmes et les migrants, ainsi que face à l’impunité. LeColectivoEPUmx a déclaré que la participation des différents pays a permis de confirmer que la crise des droits de l’Homme au Mexique se maintient. Il a appelé le gouvernement élu à tenir une réunion publique une fois les recommandations émises et à renforcer la coopération internationale pour leur mise en œuvre.
Depuis août, des alertes ont été lancées face à l’absence de fonds pour financer le Mécanisme pour la protection des défenseur.e.s des Droits de l’Homme et des journalistes. Le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme au Mexique (ONU-DH) a souligné que cela impliquait ”un risque pour les 959 bénéficiaires du Mécanisme; cela signifierait aussi que les nouvelles personnes en situation de risque ne pourraient pas recevoir de protection”. La Haute-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a déploré le nombre de défenseurs assassinés au Mexique. Elle a aussi souligné que”beaucoup d’autres ont été victimes de criminalisation, de procès préfabriqués, de campagnes de diffamation, de surveillance, de menaces de mort et d’attaques. L’année dernière a également été l’année la plus meurtrière pour les journalistes au Mexique, avec au moins 12 cas”.
Toujours en septembre, la rapporteure sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies, Victoria Tauli-Corpuz, a présenté le rapport sur sa visite au Mexique en 2017. Elle conclut que, malgré les engagements internationaux pris par le Mexique, le contexte reste marqué par de ”profondes inégalités, la pauvreté et la discrimination des peuples autochtones qui limitent leur accès à la justice, à l’éducation, à la santé et à d’autres services de base”. Elle a affirmé que les politiques de développement actuelles basées sur des méga-projets constituaient ”un défi majeur” pour les droits des peuples autochtones. ”En ce qui concerne le développement social et économique, les institutions gouvernementales doivent substituer des programmes et politiques d’assistance sociale par ceux centrés sur les Droits de l’Homme et qui promeuvent l’autonomie, l’autodétermination, ainsi que les priorités et propositions de ces peuples”, a-t-elle exprimé.
CHIAPAS: Un contexte post-électoral « sui generis »
Fait inhabituel dans cette proportion, les élections du 1er juillet dernier ont été annulées dans 10 municipalités. Des élections extraordinaires auront lieu le 25 novembre. Un autre événement notable qui a pu être stoppé: en septembre, au moins 30 femmes élues au niveau municipal ou comme députées, ont présenté leur démission. Il était à craindre que ces femmes aient été forcées de le faire, ouvrant ainsi la possibilité que leurs postes soient occupés par des hommes.
En septembre, l’Institut pour la Participation Électorale et Citoyenne (IEPC) a annoncé le début d’une consultation afin de déterminer si le vote municipal à Oxchuc se fera par le biais des us et coutumes ; ceci après que l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire (INAH) a conclu qu’il y existe des systèmes propres de réglementation interne.
Dernier élément lié au contexte post-électoral, en août, Manuel Velasco Coello a présenté une autorisation à s’absenter comme gouverneur pour assumer le poste de Sénateur de la République pour le Parti vert. Quelques jours auparavant, le Congrès du Chiapas avait modifié plusieurs articles constitutionnels lui ouvrant la possibilité de revenir au gouvernement du Chiapas pendant quelques mois, avant l’investiture du gouverneur élu, Rutilio Escandón Cadenas. Par la suite, le Sénat lui a donné l’autorisation de se séparer de son poste de législateur. Plusieurs analystes ont indiqué que ce vote avait été donné en échange du transfert de 5 députés du parti Vert à Morena, permettant ainsi au parti dirigé par le président élu d’obtenir la majorité absolue à la Chambre des députés.
Hauts-Plateaux du Chiapas: le problème des déplacements forcés continue de s’étendre
Le Centre des Droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas a enregistré au moins trois attaques contre des habitants de la municipalité d’Aldama par des groupes de civils armés de l’ejido Manuel Utrilla, municipalité de Chenalhó entre octobre et novembre. Cinq communautés d’Aldama se trouvent déplacées depuis mars 2018. Face aux derniers événements résultant d’un conflit agraire non résolu depuis 1977, il a exigé que les autorités interviennent « de toute urgence ». Il leur a également demandé ”de mettre en œuvre une stratégie efficace de démantèlement, de désarmement, d’arrestation et de punition des groupes civils armés de Santa Martha Manuel Utrilla, et d’enquêter de manière approfondie sur les autorités responsables de l’organisation et des agissements de ces groupes”.
En octobre, le Congrès du Chiapas a approuvé un accord concernant la prise en charge des personnes déplacées dans l’état. Il a instamment demandé que les mesures nécessaires soient prises pour garantir leur vie et leur intégrité, et pour permettre leur retour dans leurs communautés d’origine. Cette motion a été prise après un sit-in de 18 jours, y compris devant les installations du Congrès, de membres de la Coordination des personnes déplacées du Chiapas.
Cependant, la crise des déplacements forcés internes dans les Hauts-Plateaux du Chiapas a atteint un nouveau pic le 7 novembre lorsque environ deux mille personnes ont fui de la communauté de Chavajeval, municipalité d’El Bosque. La cause du déplacement provient d’un conflit entre les habitants de la communauté après l’assassinat de deux personnes, le 24 octobre, dans le cadre d’une embuscade à l’entrée de la communauté. Le Centre des Droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas a exhorté le gouvernement à ”privilégier le dialogue et la conciliation”; ”enquêter de manière impartiale et efficace sur les faits qui ont conduit au déplacement”; et ”résoudre la crise humanitaire”.
Avancées et défis dans la défense de la terre et du territoire
En ce qui concerne la défense de la terre et du territoire, en août, le Ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles (SEMARNAT) a refusé d’accorder l’autorisation de construire le barrage hydroélectrique de Santo Domingo. Les habitants de 51 communautés de la municipalité de Las Margaritas avaient exprimé leur opposition à ce projet. En septembre, le Premier Forum contre les barrages hydroélectriques dans la zone frontalière avait exigé son annulation définitive. En octobre, le bureau fédéral pour la protection de l’environnement (Profepa) a également suspendu le projet minier d’Ejido Nueva Francia, municipalité d’Escuintla, pour ne pas avoir obtenu une autorisation qui lui aurait permis de modifier l’utilisation des terres sous concession.
En octobre, le Congrès National Indigène (CNI) a tenu sa deuxième assemblée à San Cristóbal de Las Casas. Plus de 500 participant.e.s ont signalé des cas de violation de leurs droits dans plusieurs régions du pays. Ils ont marqué une nette distance avec le nouveau gouvernement et ont dénoncé la “continuité de la politique néolibérale”. Ils ont annoncé qu’ils présenteraient les conclusions de l’événement dans leurs régions pour consulter la proposition ”de continuer à construire une organisation qui deviendra notre propre gouvernement, autonome et rebelle, avec des compañeros y compañeras d’autres régions, pour briser collectivement l’inertie qui nous est imposée, pour voir entre tous d’où vient la tempête et au milieu de celle-ci, n’avoir de cesse de tisser de nouveaux liens jusqu’à ce que notre tissage rencontre celui des autres, ces tissages qui se tissent aux quatre coins du Mexique et du monde. Pour que tous forment leurs conseils et pour qu’ensemble nous puissions être un conseil de gouvernement”.
En novembre, un pèlerinage a eu lieu à Chicomuselo contre la militarisation et la violence, ainsi que contre les menaces proférées contre son curé. Le Réseau pour la Paix s’est dit préoccupé par ”l’installation et le fonctionnement de la caserne militaire récemment inaugurée à Chicomuselo”, craignant des ”actes d’intimidation et de provocation” à l’encontre de ”ceux qui accompagnent des personnes, des organisations et des communautés qui ont choisi de défendre la vie, pour des conditions de sécurité, mais sans guerre et pour la construction de la paix avec justice et dignité”.
OAXACA: Les Droits de l’Homme, « sous attaque »
En septembre, le rapport citoyen « Les droits de l’homme au Oaxaca- Sous attaque » a été présenté. Il a souligné que cet état figurait parmi les trois premiers du pays en ce qui concerne les attaques contre les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes, et en premier lieu dans le cas des femmes défenseures. Il a également insisté sur le recours systématique à la criminalisation de la protestation sociale pour faire taire les voix de la résistance. Illustration de ces tendances, le Comité pour la défense des peuples autochtones (CODEDI) a dénoncé le meurtre de Noel Castillo Aguilar en octobre. C’est le cinquième meurtre d’un de ses membres en 2018.
Les personnes qui défendent l’environnement sont l’un des secteurs les plus vulnérables. En octobre, 50 communautés autochtones et organisations civiles ont organisé un « procès communautaire populaire » contre les entreprises extractives nationales et internationales, ainsi que contre l’État mexicain, pour violations des droits des peuples autochtones découlant des 322 concessions octroyées au Oaxaca. Le jury a demandé l’adoption de mesures garantissant l’exercice de l’autodétermination; la suspension de la remise de concessions minières (tant qu’un nouveau cadre juridique ne serait pas établi); l’abrogation de la loi minière en vigueur et l’approbation d’une nouvelle loi qui respecte les droits des peuples et tendrait à réparer les violations commises jusqu’à présent.
En octobre, des organisations de la société civile ont demandé à la SCJN de ”protéger les droits collectifs de la communauté zapotèque et d’ordonner l’annulation des permis accordés à Eólica del Sur pour la construction d’un parc éolien à Juchitán”. Elles ont encouragé le SCJN ”à ne pas laisser passer une occasion unique de créer un précédent historique en faveur de la protection effective des droits des peuples autochtones”. Cependant, en novembre, le SCJN a rejeté cette possibilité. ”Elle était en mesure de protéger les droits des peuples autochtones, mais a préféré approuver une consultation simulée. Sa décision en faveur d’un méga-projet est contraire et régressive face aux principes et normes des droits de l’homme”, a critiqué Fundar.
Après le décret mettant en place une alerte de la violence de genre (AVG) dans 40 municipalités du Oaxaca en septembre, de nouveaux féminicides ont continué à se produire dans cette entité. Des journalistes et des organisations de la société civile ont signalé que plus de 300 meurtres contre des femmes, 278 cas de disparition forcée, 146 viols et 209 cas de violence politique à l’égard des femmes restaient sans avancées.
GUERRERO: anciens et nouveaux défis pour les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes
En septembre, quatre ans après la disparition forcée de 43 élèves de l’école rurale normale d’Ayotzinapa à Iguala, des milliers de citoyens se sont manifestés dans les rues de plusieurs villes de la République pour demander que justice soit rendue. Le même jour, AMLO s’est réuni avec les proches des victimes et s’est engagé à clarifier ce qui s’est passé par le biais d’une commission de la vérité, indépendamment de la décision d’un tribunal. Il a également accepté de solliciter l’assistance de l’ONU et de la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH). Depuis juin, un tribunal mexicain avait ordonné la création d’une commission de la vérité chargée de reprendre le processus d’enquête, mais le bureau du procureur général (PGR) s’est déclaré incapable de le faire.
Également en ce qui concerne le système de justice, plusieurs semaines après la libération de 9 membres du Conseil des éjidos et communautés opposés à la construction du barrage de La Parota (CECOP), de la Coordination Régionale des Autorités Communautaires – Police Communautaire (CRAC-PC) et de paysans de la municipalité d’Acapulco, une nouvelle persécution a été lancée contre des membres du mouvement, a dénoncé le Centre des droits de l’homme de la montagne Tlachinollan: ”Le bureau du Procureur a publié plus de 50 mandats d’arrêt contre le même nombre de membres du CECOP, dont le seul crime est de défendre leurs terres et leurs ressources naturelles”.
En ce qui concerne la liberté d’expression, Gabriel Soriano Kuri, un employé de la radio et de la télévision de Guerrero (RTG), a été assassiné en octobre. Selon Artículo 19, un jour après le meurtre, ”un corps démembré a été retrouvé (…) avec un message disant (…) ce qui suit: “Ici on me respecte, gouvernement de m…, continuez de faire affaire avec le Cida (Cartel Indépendant d’Acapulco) et ils vont tous y passer, que ce soit des journalistes ou le gouvernement, je m’en f…. ”.” S’il s’avérait effectivement lié à des motifs politiques, “cet assassinat constituerait un fait sans précédent puisqu’il confirmerait que le narcotrafic, pour arriver à ses fins, utilise la presse comme chair à canon pour faire pression au niveau politique sur les autorités. Cela indiquerait le début de nouvelles formes de violence du crime organisé contre le journalisme”.