2000
02/01/2001SYNTHESE : Actions Recommandees
31/05/2001ACTUALITÉ : Mexico. nouveaux temps, nouveaux pouvoirs
Le 1° décembre, le président élu Vicente Fox a prêté serment devant le Congrès de l’Union se convertissant ainsi en premier président de l’époque post révolutionnaire venant d’un autre parti que du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI). Lors de son premier discours il a annoncé qu’il luttera contre la corruption et l’impunité. Il s’est engagé à mettre en place sept réformes qui garantissent une « démocratie efficace et l’efficacité démocratique », et mener à terme une réforme de l’Etat qui assure un exercice du pouvoir toujours plus équilibré. Au sujet du Chiapas, peu avant sa prise de possession, il a ordonné le retrait de 53 barrages militaires dans les trois zones de conflits: Hauts Plateaux, zone Nord et Jungle Lacandone.
Cabinet « Ordre et Respect »
Le Président Fox a dit que son cabinet se fonderait sur les valeurs de « l’ordre et du respect ».
La nomination de Luis H. Alvarez comme Délégué pour la Paix au Chiapas a reçu un très bon accueil de la part de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN). Les zapatistes le considèrent comme un homme habile et doté d’une grande autorité morale dans les dialogues de Paix. Luis H. Alvarez fut membre fondateur de la Commission de Concorde et Pacification (COCOPA) et a pris part aux négociations et à la signature des Accords de San Andrés. Selon lui, le projet de la COCOPA (proposition de loi sur les Droits et la Culture Indigène, élaborée par cette instance en novembre 1996, sur la base des accords de San Andrés) ne contredit pas les principes de l’unité nationale. Ce projet propose la libre détermination et l’autonomie pour les peuples indigènes sans réduire la souveraineté nationale, et toujours à l’intérieur des limites constitutionnelles de l’Etat mexicain.
Un autre fait à relever a été la nomination du général Rafael Macedo de la Concha à la tête de la Procuration Générale de la République (PGR). Après près d’un siècle de tradition civile, pour la première fois, un militaire assume cette charge. Qui plus est, quand ce même général était procureur de la Justice militaire, il semble avoir laissé de côté une série d’accusations de violations des droits humains.
L’EZLN rompt le silence
Lors de la conférence de presse du 2 décembre dans la communauté zapatiste de La Realidad, l’EZLN a demandé au nouveau gouvernement trois signes pour relancer le dialogue : réalisation des Accords de San Andrés, liberté de tous les prisonniers politiques zapatistes et le retrait de sept positions de l’armée «dès 259 qu’elle maintient actuellement dans la zone de conflit». L’EZLN a également annoncé qu’en février 2001, 23 membres du Comité clandestin révolutionnaire indigène – comité général de l’EZLN, se rendront à Mexico pour convaincre le Congrès de l’Union des avantages du projet de loi élaboré par la COCOPA.
Bien qu’ils ne le reprennent pas tel quel dans leur demande, dans un communiqué, l’EZLN accuse le gouvernement de ne rien faire face aux groupes paramilitaires. Elle a aussi dénoncé le déplacement de neuf familles zapatistes de la communauté Santa Fe el Duraznal, municipalité de Chilon, le 20 décembre passé.
Réponses du Gouvernement
Presque immédiatement, Fox a répondu en disant qu’il cherchera à remplir les conditions de l’EZLN. Le 5 décembre, il a envoyé au Congrès la proposition de loi de la COCOPA. Plus tard, le sénateur du PRI Manuel Bartlett, en sa qualité de président de la Commission de respect de la constitution, a averti qu’il refuserait de légiférer «sous l’urgence». Selon lui, avant de se faire, il faudrait réaliser une consultation nationale vue que le projet ne doit pas uniquement se référer au Chiapas mais à tous les lieux où vivent des groupes d’indigènes.
A la demande zapatiste du retrait des troupes de différentes positions, la première à être abandonnée fut Amador Hernandez, un terrain qui fut envahi par l’armée le 9 août 1999 et dont 3,5 hectares furent expropriés par le président Zedillo au détriment des habitants. Le 22 décembre, le président Fox a restitué ce terrain à la communauté, ce qui fut salué par l’EZLN et vu comme un bon signe pour la reprise du dialogue. Le 31 décembre, la sortie des militaires de la caserne Jolnachoj (San Andres Larrainzar) s’est vue accélérée par une protestation de sympathisants zapatistes. Par ordre présidentiel, Cuxulja fut la troisième position démantelée le 9 janvier. Et, le 17 de ce même mois, l’armée sortit du campement militaire de Roberto Barrios. Après ce quatrième démantèlement, le président Fox a annoncé qu’il n’y en aura pas d’autres jusqu’à ce que l’EZLN donne un signal de reprise du dialogue.
Chiapas avant le changement de gouverneur
Après la détention le 28 octobre de 11 chefs du supposé groupe paramilitaire Union Campesina Indigena Agropecuaria y Forestal (scission de « Développement, Paix et Justice »), et peu de temps avant la prise de possession du nouveau gouverneur du Chiapas, Pablo Salazar, l’ambiance devint tendue. Ceci du au fait que différentes communautés, spécialement dans la zone Nord et des Hauts Plateaux, et parmi eux les déplacés de Tierra y Libertad, Yajalon (délogés le 3 août 2000) ont dénoncé les menaces dont elles furent objet de la part des paramilitaires.
Dans ce climat d’insécurité, au petit matin du 13 novembre, 150 policiers judiciaires fédéraux et 20 agents du Ministère Public ont réalisé une opération à Los Chorros, municipalité de Chenalho, en cherchant des armes aux mains des supposés paramilitaires. Alors que l’armée restait passive devant l’agression de la communauté aux agents fédéraux, les habitants empêchèrent l’opération qui se solda par plus de 20 personnes blessées. La PGR reconnut son échec et annonça son intention de continuer ces opérations.
Prise de possession de Pablo Salazar
Le 8 décembre, en présence du président Vicente Fox, Pablo Salazar Mendiguchia a assumé la gouvernement du Chiapas comme premier gouverneur ne faisant pas partie du PRI dans l’histoire post révolutionnaire. Dans son premier discours il a sollicité du président Fox que se fassent un audit de tous les moyens financiers fédéraux qui ont été envoyés ces dernières années au Chiapas. Il a signalé qu’il fera valoir l’état de droit et appliquera la loi pour qu’il n’y ait plus d’épanchement de sang. Il a relevé la nécessité de connaître la vérité sur les massacres d’Acteal et El Bosque et sur «les bandes paramilitaires».
Quant à la formation de son cabinet, il est composé de membres de la société civile et de chefs d’entreprises. Emilio Zebadua, membre de l’Institut Fédéral Electoral fut nommé Secrétaire du Gouvernement, Porfirio Encino, de l’Association rurale d’intérêt collectif indépendante et démocratique (ARIC-I), une organisation indigène, occupe le secrétariat des peuples Indigènes.
Actions du nouveau gouverneur
L’exécutif de l’Etat a promis qu’il retirera les effectifs de polices conjointement au retrait de l’Armée mexicaine des sept bases militaires exigées par l’EZLN pour recommencer le dialogue. Il a supprimé la Commission de l’Etat pour la Redéfinition Municipale formée par le gouvernement antérieur, facteur hautement conflictuel, puisqu’il avait crée sept nouvelles municipalités principalement dans les régions où se trouvaient les conseils autonomes de l’EZLN.
Dans le même sens, le secrétaire du gouvernement, Emilio Zebadua, a signalé que les instances pour la redéfinition municipale portaient préjudice à une sortie pacifique du conflit et à l’indépendance de la Suprême Cours de Justice de l’Etat (SJTE) puisque ces deux entités étaient à la charge du président de l’organisme, Noé Castanon. Il a ajouté que les municipalités autonomes devaient être prises en compte de manière générale dans la révision des Accords de San Andrés.
D’autre part, 22 zapatistes furent libérés de la prison de Cerro Hueco en présence du commissaire pour la paix, Luis H. Alvarez. D’un total de 103 détenus ou en procès depuis 1994, plusieurs avec des condamnations jusqu’à 25 ans, 81 indigènes espèrent encore leur libération. Le procureur de la justice de l’Etat a dit que le cas des zapatistes prisonniers sera solutionné de deux manières : la Loi de la Sentence Suspendue pour ceux qui ont été condamnés, et l’arrêt des actions pénales pour ceux qui sont en procès.
Lutte de pouvoirs
Quelques jours avant la prise de possession du nouveau gouverneur, la fraction parlementaire du PRI a approuvé une série de réformes au code des affaires publiques, selon Salazar «pour enlever la possibilité à l’Exécutif de réviser les comptes des mairies à travers du Contrôle Général de l’Etat et convertir le pouvoir législatif en unique pouvoir avec la capacité de faire un audit des gouvernements municipaux».
Les membres du PRI au sein du Congrès local firent une demande de procès judiciaire contre Salazar et Zebadua, parce que la nomination du secrétaire du Gouvernement, Emiliano Zebadua serait anticonstitutionnelle «parce qu’il n’est pas du Chiapas». Jusqu’à la résolution du conflit, le Congrès refuse de discuter les différentes propositions de l’Exécutif (comme la proposition de renvoyer une réforme du Congrès d’octobre 2000 pour interdire les alliances de partis pour les élections aux présidences municipales et à la députation, et une proposition de réforme législative). En plus, bien que Salazar ait dissout la commission de redéfinition municipale, le Congrès de l’Etat a indiqué qu’il continuera de discuter la deuxième étape de ce projet.
Ils ont augmenté le budget du Congrès de 90 %, réduisant en même temps le budget du Développement Social de 17%. Le gouverneur apposa son veto parce que cela contrevenait aux dispositions de la Constitution Politique du Chiapas. Tant que continuera la lutte de pouvoirs, au Chiapas le budget de 2000 est toujours en vigueur.
De son coté, le Président du STJE, Noé Castanon, rendit responsable le gouverneur Salazar des menaces de mort contre lui et contre 16 magistrats du PRI. Noé Castanon, qui fut responsable du STJE durant 6 ans, fut réélu pour une autre période par le vote issu des magistrats du PRI.
Autres changements
Par un communiqué de la présidence, la fin des requis migratoires pour les observateurs des droits humains dans le pays a été rendue publique. Sans permis, cette activité, est sujette à l’état de droit et aux règles juridiques.
Pour la première fois dans l’histoire électorale du Mexique, le Tribunal Electoral du Pouvoir Judiciaire de la Fédération a annulé les élections du gouverneur de Tabasco (état voisin du Chiapas) pour irrégularités. Le candidat du PRI fut révoqué de sa charge. Après une semaine d’incertitude politique, durant laquelle l’Etat se trouva avec deux gouverneurs intérimaires, finalement grâce à un accord entre le Ministère de l’Intérieur, les dirigeants nationaux des partis politiques et le Congrès local, fut reconnu la nomination d’un gouverneur intérimaire issu du PRI avec engagement de convoquer des élections en novembre 2001 et de laisser le pouvoir en décembre 2001.
Au Yucatan, s’est ouvert un autre conflit électoral à cause de la nomination unilatérale de membres du Conseil Electoral de l’Etat. Le même tribunal fédéral intervint pour exiger du Congrès à majorité du PRI l’élaboration d’une nouvelle liste plus ouverte de conseillers électoraux. Les membres du PRI ont refusé et ont annoncé que le Conseil nommé par eux continuerait son travail.
A Oaxaca (proche du Chiapas) a été approuvé, fin décembre, une Loi d’Amnistie bénéficiant à toutes les personnes engagées dans les groupes de guérilleros. Par la même 32 personnes furent mises en libérés et 129, qui étaient en fuite et avaient certainement des liens avec l’Armée Populaire Révolutionnaire (EPR) en furent aussi bénéficiaires.