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11/09/2022DOSSIER : Disparition forcée au Mexique, l’affaire Ayotzinapa
15/12/2022
E n septembre, la Chambre des députés a approuvé l’initiative du président Andrés Manuel López Obrador (AMLO) qui octroie le contrôle total de la Garde nationale au Ministère de la Défense Nationale. Le lendemain, un journaliste a demandé à López Obrador pourquoi il avait changé d’avis alors que, pendant sa campagne, il avait clairement exprimé sa position contre la militarisation et promis de renvoyer les militaires dans leurs casernes dans 6 mois après son arrivée au pouvoir. « J’ai changé d’avis quand j’ai vu le problème dont j’ai hérité », a reconnu AMLO.
Plusieurs organisations civiles se sont prononcées contre cette décision en considérant qu’elle va « à l’encontre de la volonté du peuple qui l’a élu, qui, entre autres, a voté pour lui en espérant qu’il agirait pour pacifier le pays, stopper les mégaprojets contre les communautés et mettre fin à la militarisation. C’est un acte contre la Constitution et le gouvernement civil ». La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Nada Al-Nashif, a exprimé son inquiétude, notamment face à la faible obligation de rendre des comptes des forces armées. En outre, cette stratégie n’a pas été en mesure de réduire la criminalité dans le pays, mais plutôt les plaintes pour violations graves des droits humains ont augmenté. Selon les médias, « jusqu’à présent durant ce mandat de six ans, il y a eu plus de 130 000 homicides volontaires, 33 000 disparus et 3 615 féminicides ; dont 98% restent impunis ». Cependant, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) a déclaré que la décision « peut être et est recevable, du point de vue des droits humains » tant que l’intervention des militaires est limitée dans le temps et liée à des situations exceptionnelles, raison pour laquelle la Commission en pense pas promouvoir une action d’inconstitutionnalité.
Un autre aspect qui a également conduit à se poser des questions sur ce décret a trait à une enquête du Réseau pour les droits numériques (R3D) et de divers médias: celle-ci a révélé que le logiciel espion Pegasus a continué à fonctionner depuis le début du mandat d’AMLO. Ce logiciel malveillant n’est censé être vendu qu’aux gouvernements pour poursuivre des terroristes et des criminels ; cependant, dans le cas du Mexique, son utilisation a été détectée depuis 2017 pour surveiller les défenseurs des droits humains, les journalistes et les citoyens. L’enquête la plus récente détaille que les téléphones d’au moins 3 journalistes et défenseurs des droits humains ont été espionnés avec Pegasus entre 2019 et 2021. L’enquête révèle que le Ministère de la Défense est la structure qui a établi le contrat de 2019. AMLO a déclaré que « nous n’aurions aucune raison de faire ca, non suelement parce que c’est un abus mais aussi parce que c’est contraire à nos principes, à nos convictions, nous qui avons été espionnés pendant des années, persécutés, nous ne pourrions pas faire la même chose ».
Plusieurs mobilisations ont été organisées pour freiner la militarisation, parmi celles-ci, la marche annuelle en commémoration du massacre d’étudiants à Tlatelolco le 2 octobre 1968. Plus de cinq décennies plus tard, plusieurs revendications semblent encore à l’ordre di jour : non à la militarisation et la fin de l’impunité. « L’armée mexicaine a commis de manière répétée et systématique de graves violations des droits humains, des persécutions et des détentions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des tortures et des traitements cruels et inhumains, des viols et des exécutions; c’est le dénominateur commun d’une longue liste de griefs », a déclaré le Comité 68 ‘Pro libertés Démocratiques’.
Pour sa part, le Congrès National Indigène (CNI) a convoqué le 12 octobre, jour du 26e anniversaire de sa fondation, une « Action mondiale contre la militarisation et la guerre capitaliste et patriarcale contre les peuples de tout le Mexique et du monde ». « Le combat pour la vie est notre position collective depuis 530 ans et la guerre contre nos peuples a toujours été la réponse des ‘mauvais gouvernements’. Pour cette raison, nous élevons la voix et nous nous mobilisons pour exiger l’arrêt total du siège militaire, des attaques paramilitaires et de la guerre contre-insurrectionnelle dirigée contre l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) et les communautés zapatistes ; et contre les peuples autochtones du Mexique par le biais de la la militarisation et la paramilitarisation, le crime organisé, les ‘mégaprojets de mort’ et la dépossession de nos terres et territoires », a déclaré le CNI.
Autres préoccupations en matière de droits de l’Homme
Au cours des douze derniers mois, il y a eu un total de 118 situations qui ont violé les droits humains de défenseurs, selon le rapport « Défendre les droits humains au Mexique : entre omission et simulation », présenté par Action Urgente pour les Défenseurs des Droits de l’Homme (ACUDDEH), le Comité Cerezo México et la Campagne Nationale contre les disparitions forcées. Bien que par rapport aux gouvernements précédents, le nombre de violations des droits humains contre des défenseurs ait diminué, le gouvernement d’AMLO « n’a pas respecté les responsabilités qui lui incombent en ce qui concerne les droits à la mémoire, à la vérité et à la justice des victimes ». 69% des actes ont été perpétrés par commission avec une augmentation « de la participation à d’autres violations des droits de l’homme par des gouvernements dirigés par Morena, et l’augmentation d’autres violations par le gouvernement fédéral ; la participation accrue des forces armées ; et la lenteur dans l’élaboration, l’amélioration et le perfectionnement d’une initiative de loi générale pour le respect et la promotion des droits des personnes qui défendent les droits de l’homme et des journalistes ».
D’autre part, selon le rapport de Global Witness, le Mexique s’est classé premier en 2021 sur la liste des pays comptant le plus d’activistes écologistes assassinés, avec un total de 54 victimes. Près de la moitié d’entre eux étaient des personnes autochtones. « Au cours des 10 dernières années, le pays est rapidement devenu l’un des endroits les plus dangereux pour les défenseurs de la terre et de l’environnement, avec 154 cas documentés au cours de cette période », indique le rapport.
Autre aspect de plus en plus préoccupant, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits humains des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, Cecilia Jimenez-Damary, a visité Mexique du 29 août au 9 septembre. Elle a été à Mexico, Chihuahua, Guerrero et au Chiapas. A l’issue de sa visite, elle a souligné que « les causes de déplacement sont diverses et multifactorielles. Parmi celles-ci se trouvent différents types de violence, souvent de la part du crime organisé, parfois liés à des projets de développement, à l’exploitation minière et forestière illégale, ou à des conflits électoraux, religieux et agraires ». Elle a mentionné que « le gouvernement fédéral n’a pas de statistiques, mais que certaines organisations, universitaires et autorités locales, lui ont donné des estimations selon lesquelles il y aurait entre 350 000 et 400 000 personnes déplacées internes ». Elle a recommandé de créer une loi qui protège les personnes déplacées à l’intérieur du pays, ainsi qu’un registre fédéral des victimes. Elle a aussi exhorté le gouvernement à allouer un budget adéquat et soutenu pour pouvoir fournir aux personnes déplacées des soins, une protection et des solutions durables.
CHIAPAS : plusieurs sources de préoccupation sur fond de violence croissante due aux combats entre groupes criminels
En septembre, le Centre des droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas (Frayba) a exprimé son inquiétude face à l’approbation de la réforme de la Garde nationale. «Des casernes ont été installées sur les territoires des peuples originaires qui s’opposent à la dépossession de leurs espaces de vie à travers les mégaprojets du gouvernement fédéral, tels que le train maya, le couloir interocéanique, la raffinerie Dos Bocas ou l’infrastructure routière qui les relie. », a-t-il alerté. Il a également dénoncé qu’« au milieu de la remilitarisation actuelle du Chiapas, le trafic et la consommation de drogue se sont intensifiés, les disparitions et les homicides persistent, ce qui montre que, comme dans les années 1990, la stratégie militaire ne fonctionne pas. Parmi les impacts de la violence, citons : les communautés attaquées et forcées de se déplacer, dans d’autres des couvre-feux ont été imposés par des groupes criminels et il existe des zones de silence”.
Dans ce même sens, l’Assemblée du Mouvement des femmes pour la défense de la Terre mère et des territoires s’est réunie à Chapultenango pour analyser la situation au Chiapas. « Nous sommes d’accord pour affirmer que sur tous nos territoires, le crime organisé est au pouvoir, nous constatons une augmentation de la vente et de la circulation d’armes, de drogues, de la prostitution et de l’alcoolisme. En complicité avec un processus de militarisation qui permet la dépossession et le contrôle de nos territoires. Les femmes étant les plus touchées par l’augmentation des féminicides, des morts, de la faim et des disparitions de filles et de jeunes femmes», a-t-elle déclaré.
De même, en septembre, des habitants de Santa Marta, dans la municipalité de Chenalhó, ont signalé des coups de feu, des maisons incendiées et le déplacement de plus de 100 personnes, ainsi que 4 morts. Selon les témoignages, au début de cette année, un accord de paix et de désarmement a été signé mais certaines personnes qui voulaient continuer à faire partie du groupe armé qui maintient l’hostilité contre leurs voisins dans la municipalité d’Aldama ont été expulsées. Ces mêmes personnes (environ 60) ont décidé de reprendre leurs maisons et des terres par la force.
Ce même mois, plus d’un millier d’hommes et de femmes convoqués par le Peuple Croyant de la zone Chab, ont participé à un pèlerinage à Bachajón, municipalité de Chilón, pour exiger la libération immédiate de neuf dirigeants et défenseurs communautaires ; deux de cette région, cinq de San Juan Cancuc et deux de Pantelhó, en plus de demander l’annulation définitive du mandat d’arrêt contre le père Marcelo Pérez Pérez. « Ces arrestations tentent de réprimer la juste dénonciation de nos peuples et entravent la paix sur nos territoires. La criminalisation de ces frères tient à leur travail de défense les droits des peuples originaires, ainsi que leur territoire et leurs coutumes », ont-ils affirmé.
Pointant un autre type d’inquiétude, Roberto Flores, journaliste et directeur du site « Chiapas Denuncia ¡Ya ! », est porté disparu depuis septembre. Il a été vu pour la dernière fois à Comitán, d’où il est originaire. Chiapas Denuncia ¡Ya! est un site informatif qui couvre les plaintes des citoyens contre des irrégularités présumées de la part d’autorités. Selon l’organisation pour la liberté d’expression Article 19, Flores avait reçu des intimidations après avoir publié des informations liées au cartel de Sinaloa.
D’autre part, en octobre, la paroisse de San Pedro et San Pablo de Chicomuselo a dénoncé l’aggravation de la situation dans cette zone, ainsi que les menaces, le harcèlement et l’intimidation contre les défenseurs des droits humains dans cette municipalité. Cela serait du à l’intérêt d’entreprises et de particuliers à redémarrer l’exploitation minière. Ils signalent l’entrée de plusieurs camions de fret pour transporter du matériel minier. La paroisse a indiqué qu’ “une plainte a été officiellement déposée auprès du procureur fédéral pour la protection de l’environnement (PROFEPA) mais que la réponse a été évasive, arguant qu’il n’y existe pas des conditions de sécurité suffisantes pour mener l’enquête face à la vague de violence et d’insécurité dans la région ».
Enfin, en novembre, des groupes féministes, des proches de victimes de fémicides et d’autres personnes ont organisé une manifestation à Tuxtla Gutiérrez pour dénoncer l’augmentation de la violence contre les femmes dans l’état. Ils ont rappelé que le 18 novembre 2016, une alerte face à la violence de genre contre les femmes (AVGM) a été mis en place au Chiapas. Cependant, jusqu’à présent, les signalements de ce type de violence ont augmenté. Ils ont exigé la justice, des enquêtes avec une perspective de genre qui permette de capturer les responsables, des opportunités de vie décentes pour les femmes et des institutions publiques capables de prévenir, punir et éradiquer la violence à l’égard des femmes.
Un autre aspect qui alimente la perception de manque de contrôle a été la multiplication de barrages routiers, les principaux étant dirigés par des groupes insatisfaits face à des processus électoraux. L’un de ces groupes était composé d’habitants de Teopisca qui, pendant plusieurs semaines en août et septembre, ont bloqué la route fédérale Teopisca-Comitán et Teopisca-San Cristóbal. Ceci, pour exiger la destitution immédiate du président du conseil municipal Luis Alberto Valdez Díaz, qui a été nommé par le Congrès de l’état pour remplacer son frère et alors maire de Teopisca, Rubén Valdez, assassiné au mois de juin. L’assemblée générale composée de 52 communautés a exprimé qu’on n’a pas respecté leurs droits d’élire démocratiquement leurs gouvernants.
Un autre groupe qui a bloqué les routes est composé d’habitants d’Oxchuc qui exigent le départ de Luis Santiz Gómez, actuel président du conseil de cette municipalité, puisque son mandat est terminé et qu’un nouveau président municipal devrait être nommé en respectant leurs us et coutumes. Certains de ces barrages ont été violents et ont conduit à l’arrestation de dizaines de personnes.
OAXACA : Les attaques contre les défenseurs des droits humains se poursuivent
En septembre, alors qu’ils effectuaient des activités de nettoyage dans une école primaire communautaire, un groupe de personnes, dont des femmes et des enfants (filles et garçons), a été attaqué par des hommes armés. L’Union Civique Démocratique des Quartiers, Colonies et Communautés (Ucidebacc) a dénoncé que le défenseur des droits humains Gregorio López avait été blessé par balle. En outre, elle a mentionné qu’« il est clair pour nous que cette nouvelle attaque obéit à une politique de répression systématiquement soutenue contre notre organisation sociale, ses membres et les personnes qui nous accompagnent. Depuis le meurtre de notre compañero Humberto Valdovino Fuentes, nous avons vu une augmentation des incidents d’insécurité ». Ce même jour, divers groupes féministes ont dénoncé le harcèlement et la criminalisation dont Lucero Rivero Ortiz, porte-parole de l’UCIDEBACC a fait l’objet, Ceci depuis qu’elle exige des éclaircissements sur le meurtre de son conjoint Baldovino Fuentes, défenseur de la communauté afro-mexicaine de l’UCIDEBACC en mai de cette année. Depuis 2020, Lucero fait partie du Mécanisme fédéral de protection des défenseurs et des journalistes, mais elle considère que cela ne garantit pas sa protection.
En octobre, Filogonio Martínez Merino, un ancien agent municipal de Paso de la Reyna, dans la municipalité de Santiago Jamiltepec a été assassiné. Depuis quinze ans, il a participé à des manifestations contre les projets hydroélectriques de Paso de la Reina. Martínez a été commissaire de l’ejido de Paso de la Reyna dans entre 2008-2021. Cinq défenseurs du Conseil des peuples unis pour la défense du Río Verde (Copudever) ont été assassinés au début de 2021, des crimes qui restent impunis à ce jour.
Par ailleurs, peu de progrès sont à noter quatre ans après le lancement de l’alerte contre la violence sexiste dans 40 municipalités du Oaxaca. Depuis le début de l’année, 100 femmes du Oaxaca ont été assassinées, selon le collectif « Rosario Castellanos, GES Mujer ». En 2021, GES Mujer a enregistré 87 féminicides. Au cours des 6 dernières années, 676 filles et femmes ont été victimes de meurtres violents. GESMujer a souligné que les mêmes pratiques se maintiennent: des autorités qui en font pas cas ou sont négligentes, des enquêtes sans perspective de genre ou avec une intention claire de cacher ou de minimiser la violence féminicide, ainsi que la tendance à la revictimisation des familles qui demandent justice.
Malgré le contexte critique, deux mouvements de défense des terres et territoires avancent dans leurs revendications. Après environ 15 ans de lutte, l’Assemblée générale de la communauté de San Bartolo Coyotepec a réussi à fermer les puits qui depuis 2002 avaient été concédés à l’entreprise d’emballage Gugar S.A. De C.V. dans la communauté. Elles argumentaient que la concession avait été accordée sur un terrain communal et sans consultation préalable. D’autre part, en septembre, le tribunal agraire unitaire de Tuxtepec a statué en faveur des membres de la communauté d’Unión Hidalgo qui étaient en procès depuis 9 ans contre Desarrollos Eólicos Mexicanos (Demex), une filiale de l’entreprise espagnole Renovalia Energy. L’annulation des baux sur des terrains qui « étaient abusivement considérés comme propriété privée alors qu’en réalité ce sont des terres communales » a été accordée. Certaines organisations ont souligné que cette décision est extrêmement importante car elle laisse la décision de conclure des contrats de location entre les mains des communautés.
GUERRERO : Les murs de l’impunité favorisent l’exacerbation de la violence
L’affaire la plus notoire de violations des droits de l’homme au Guerrero est celle d’Ayotzinapa, et bien que plusieurs instances nationales et internationales aient été créées pour aider à élucider ce cas, l’impunité reste intacte (voir Dossier). En septembre, un juge fédéral a acquitté José Luis Abarca, ancien maire de la municipalité d’Iguala, pour son rôle présumé dans la disparition de 43 élèves de l’école normale rurale d’Ayotzinapa en 2014.
En octobre, le Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants (GIEI) a présenté une expertise technique qui prouve que 181 des 467 captures d’écran présentées par la Commission vérité et accès à la justice dans l’affaire Ayotzinapa (Covaj) dans son rapport d’août 2022 « ne sont pas confiables, car rien ne garantit qu’elles correspondent à des messages originaux ». Le GIEI a déclaré que « la tentative du gouvernement mexicain d’accélérer les résultats dans l’affaire Ayotzinapa (…) génère une plus grande incertitude et un énorme malaise ».
Profitant de ce doute, en novembre, les avocats de quatre militaires emprisonnés pour cette affaire ont accusé le chef de la Commission pour la vérité et l’accès à la justice (COVAJ), Alejandro Encinas, du délit présumé de fabrication de preuves pour incriminer leurs clients. Le Centre des droits de l’homme Miguel Agustín Pro Juárez, qui accompagne les proches des victimes, a déclaré que « la non-vérification de certaines parties du rapport de la COVAJ n’élimine pas les preuves de l’accusation de collusion entre trafiquants de drogue et le 27e bataillon militaire. »
D’autres cas, moins médiatisés, restent sans avancées dans les enquêtes. Trois ans après la disparition et l’assassinat du défenseur Arnulfo Cerón, des proches et des collègues du Frente Popular de la Montaña ont appelé à persévérer dans la recherche de la justice. Le Centre des droits humains de la Montagne Tlachinollan a affirmé que « nous avons déjà constaté qu’aucun parti politique quel qu’il soit ne va s’engager auprès des victimes, ils ont leurs intérêts économiques et ne sont pas intéressés par la justice. (…) nous devons (…) continuer à nous battre comme les hommes et les femmes qui ont perdu la vie en luttant pour transformer notre État ».
Pendant ce temps, la violence ne recule pas non plus. En octobre, au moins 20 personnes ont été assassinées, dont le président municipal de San Miguel Totolapan et son père, qui avait également été maire de cette municipalité à deux reprises. Selon Ricardo Mejía Berdeja, sous-secrétaire à la Sécurité publique, ces attaques sont dues à un différend territorial entre des groupes du crime organisé. « Dans cette région, un groupe connu sous le nom de Los Tequileros domine le transfert et la commercialisation des pavots, et réalise des enlèvements et extorsions. Le différend pourrait être avec La Familia Michoacana », a-t-il déclaré.
En novembre, trois membres du Conseil indigène et populaire Guerrero-Emiliano Zapata (Cipog-EZ) ont été assassinés par le groupe criminel « Los Ardillos » et « les mauvais gouvernements » à Chilapa de Álvarez. Des membres de l’organisation ont déclaré s’être rendus auprès du président de la République pour l’avertir de la situation mais que « comme si rien n’avait été dit et que nous étions condamnés à répéter la même histoire, à pleurer nos morts et nos disparus, le 5 novembre trois de nos frères ont été tués”. Ils ont rappelé que depuis 2015, 50 membres de leur groupe ont été assassinés et 19 autres sont portés disparus.
Autre sujet de préoccupation : selon Article 19, le Guerrero est le deuxième état du Mexique le plus dangereux pour pratiquer le journalisme, avec 16 cas des 157 homicides de journalistes commis au cours des deux dernières décennies. Avec le meurtre de Fredid Román, directeur du journal « La Realidad » et chroniqueur pour divers médias locaux, en août et depuis début 2022, 15 journalistes avaient été assassinés au Mexique.
Enfin, dans des documents divulgués par les « Guacamaya Leaks », des informations ont été filtrées révélant que le Ministère de la Défense nationale (SEDENA) identifie Vidulfo Rosales Sierras, avocat dans l’affaire Ayotzinapa, comme membre d’une organisation dédiée, entre autres, à l’extorsion et à des enlèvements au Guerrero. En outre, des accusations sont portées contre d’autres activistes sociaux et défenseurs des droits de l’Homme. Diverses organisations ont déclaré que « l’accord entre les forces armées et le président de la République leur garantit l’immunité et elles estiment qu’elles ont le droit de pointer du doigt et d’attaquer les activistes sociaux et les défenseurs des droits de l’Homme. Pendant ce temps, les bandes criminelles sont autorisées à agir librement et, dans de nombreux cas, s’associent à elles pour commettre des crimes.