2016
13/02/2017DOSSIER : Congrès National Indigène : nouvelle proposition qui suscite “des échos d’espoir”…
07/04/2017Le monde entier a été bouleversé le 8 novembre 2016 quand, malgré les pronostics et le rejet de larges franges de la population, y compris à l’étranger, le candidat républicain Donald Trump a été élu Président des Etats-Unis d’Amérique.
Ce résultat fait craindre différents problèmes au niveau international, en raison de son inquiétant slogan “les Etats-Unis d’abord” qui se caractérise, entre autres, par un certain dédain à l’égard de l’ONU et la mise en doute des études scientifiques à l’origine des mesures globales prises face au changement climatique.
En tant que voisin immédiat du géant nord américain et en raison d’une économie extrêmement dépendante de leurs relations, le Mexique est très vulnérable. Pendant sa campagne, Trump a promis l’expulsion des migrants sans droit au séjour (dont 11 millions de Mexicains), de bloquer l’argent envoyé par les migrants à leurs familles, de prolonger le mur qui sépare les deux pays aux frais du peuple mexicain, de renégocier l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain, entré en vigueur en 1994) et de sanctionner les entreprises des Etats-Unis qui délocalisent leurs usines au Mexique par des droits de douane, ainsi que d’autres mesures protectionnistes.
Il sera toutefois difficile pour Donald Trump de tenir ses promesses, celles-ci nécessitant des modifications législatives et l’accès à un budget qui dépend du Congrès. Pour tempérer sa victoire, rappelons que, s’il a gagné au suffrage indirect grâce au Collègue électoral, il a perdu le scrutin populaire, et des secteurs importants de la société civile se mobilisent contre lui. Reste à voir quels projets il arrivera à imposer et quelles en seront les conséquences…
National : une stratégie de sécurité qui fait des dégâts
Le 1er janvier, le prix du carburant a augmenté de 20% au Mexique. Cette augmentation a été accompagnée de celle d’autres biens et services, ce qui affecte considérablement le niveau de vie de la population. Le président Enrique Peña Nieto (EPN) –dont la côte de popularité arrive à peine à 25% selon les sondages- a défendu cette augmentation, argumentant que “c’était une mesure nécessaire à la stabilité économique du pays”. Le “gasolinazo” a déclenché des manifestations, le blocage de routes et la razzia de stations essence dans au moins 25 états du pays, entraînant la mort de 3 personnes et l’arrestation de 600 autres. 400 commerces ont également été mis à sac. Il a néanmoins été prouvé que plusieurs de ces incidents avaient été provoqués par ou commis avec la complicité des autorités.
D’autre part, 10 ans après le début de la guerre lancée contre la délinquance par l’ancien président Felipe Calderón Hinojosa (2006-2012), le bilan est alarmant : assassinat de 186 000 personnes, plus de 28 000 disparitions forcées (auxquelles s’ajoutent 11 nouveaux cas chaque jour, selon le Centre ProDH), des dizaines de milliers de personnes déplacées ; des chiffres comparables à ceux des conflits armés en Amérique Centrale dans les années 80. Plus d’un billion de pesos ont été dépensés, sans que l’insécurité et les atteintes à la population civile ne diminuent pour autant, et alors que les violations des Droits de l’Homme s’aggravent. De plus la consommation de drogue a augmenté dans le pays et, bien que certaines têtes de réseaux aient été arrêtées, 9 cartels et 37 bandes du crime organisé continuent d’opérer. Les organisations civiles jugent que “le durcissement des mesures de sécurité n’a pas permis et ne réussira pas à diminuer la violence dans le pays. Nous vivons aujourd’hui dans un pays beaucoup plus dangereux, aux institutions plus faibles et avec un système de justice pénale qui ne fonctionne pas”.
L’Armée est l’un des éléments les plus critiqués de cette stratégie, celle-ci ayant été déployée (hors de son mandat constitutionnel) pour assurer des missions de sécurité. En décembre, le Ministre de la Défense, le général Salvador Cienfuegos Zepeda, s’est montré direct : “On ne forme pas les militaires pour poursuivre des délinquants”. Et face à l’absence de cadre légal, “ils y pensent à deux fois avant de continuer ou pas d’affronter ces groupes, vu qu’ils courent le risque d’être inculpés pour un délit en relation avec les Droits de l‘Homme”. Il a déclaré: “Nous demandons la régularisation des activités des Forces Armées (…) Nous remplissons des fonctions qui ne sont pas les nôtres, tout ça par manque d’effectifs parmi ceux dont c’est le mandat, ou parce qu’ils ne sont pas formés“. Peña Nieto a par la suite affirmé que les militaires resteraient dans la rue “tant que l’objectif visé de plus de paix et de tranquillité dans le pays n’était pas atteint”.
De fait, le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) a présenté un projet de Loi de Sécurité Intérieure, qui permettrait de normaliser la participation militaire dans les tâches de sécurité publique. Le Centre Pro DH questionne le fait qu’“au lieu d’entreprendre sérieusement un programme de retrait progressif des Forces Armées des tâches de sécurité -comme les mécanismes internationaux l’ont proposé-, on relance l’idée de créer un cadre légal ad hoc pour l’Armée et la Marine, ce qui normalise l’état d’exception”. Des dizaines d’associations civiles, des universitaires et des chercheurs ont demandé à la Chambre des Députés “de ne pas approuver précipitamment” la pérennisation de la présence militaire dans des tâches relevant de la sécurité publique.
Enfin, en janvier, le Rapporteur spécial des Nations-Unies sur la situation des défenseur.es des Droits de l’Homme, Michel Forst, était en visite au Mexique. Après avoir parcouru le pays, il a noté les “niveaux élevés d’insécurité et de violence”, dans un “contexte compliqué marqué par le crime organisé, la corruption et la répression de la part de l’État”. Il a exprimé son inquiétude face au fait que “le pourcentage infime d’enquêtes résolues et d’élucidation des crimes commis à l’encontre des défenseurs (…) a créé un sentiment d’impunité généralisée”.
Référendum du Congrès National Indigène : “un écho d’espoir”…
En novembre, 33 ans après sa création, l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) a évoqué le référendum organisé avec le Congrès National Indigène (CNI), pour l’éventuelle formation d’un Conseil Indigène de Gouvernement et la potentielle candidature d’une femme indigène aux élections présidentielles de 2018 (voir dossier). Il a précisé que “c’est bien le CNI qui décidera ou pas de présenter une candidate et il pourra, le cas échéant, compter sur le soutien du zapatisme”. Mais “Non, ni l’EZLN comme organisation ni aucun-e de ses membres ne se présentera aux élections de 2018 pour un mandat populaire. Non, l’EZLN ne se transformera pas en parti politique. Non, l’EZLN ne présentera pas une femme indigène zapatiste comme candidate à la présidence de la République (…). Non, l’EZLN n’a pas changé de posture, et ne continuera pas le combat sur le terrain électoral institutionnel ”.
Le 2 décembre, le CNI et l’EZLN ont dénoncé plusieurs cas d’agressions et de harcèlements: “les puissants, les entreprises minières, les militaires et les paramilitaires à la solde des narcotrafiquants ont tellement peur, que notre processus de consultation est parasité, harcelé et agressé dans les villages où nous nous réunissons pour discuter et décider des étapes que le CNI doit suivre“. En décembre, le CNI et l’EZLN ont confirmé la décision de « nommer un Conseil indigène de Gouvernement avec des représentants hommes et femmes de chacun des villages, tribus et nations membres. Et ce conseil se propose de gouverner le pays. Il aura pour porte-parole une femme indigène du CNI, (…) qui sera candidate indépendante à la présidence du Mexique″. La consultation a déjà eu lieu dans 525 communautés appartenant à 43 ethnies différentes de 25 états mexicains. 430 d’entre elles ont approuvé la proposition. L’assemblée constituante du Conseil Indigène de Gouvernement aura lieu en mai au Chiapas.
GUERRERO: la vague de violence et d’impunité continue
En décembre, la CNDH (Commission Nationale des Droits de l’Homme) et le Bureau du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme au Mexique ont rencontré les victimes, les défenseur-e-s des Droits de l’Homme et les autorités de Guerrero. Ils ont rendu visibles “la situation d’insécurité dans l’état, l’impunité des cas de violations des Droits de l’Homme, en particulier des disparitions, le manque d’accès à la justice, les menaces répétées à l’encontre des défenseur-e-s des Droits de l’Homme, et les déplacements forcés”. Le magazine Proceso souligne quant à lui : “la narcopolitique rampante, les affrontements entre cartels, l’absence d’état de droit, les assassinats et enlèvements continuent même après des opérations conjointes entre les différentes forces de l’Etat, la tragédie d’Ayotzinapa, et des milliers de discours et de promesses des autorités ”.
En novembre, le corps d’Irineo Salmerón Dircio, coordinateur du Comité de Liaison de la CRAC-PC (Coordination Régionale des Autorités Communautaires, Police Communautaire) a été retrouvé à Chilapa. Les organisations civiles ont déclaré que cela “constitue une attaque directe contre les activités de la CRAC-PC”. Elles ont exprimé que “cela survient dans le contexte d’une vague d’insécurité et de violence qui règne dans plusieurs zones de Guerrero, comme à Chilapa et Tixtla ; c’est cette situation qui a entraîné la création de la CRAC-PC et qui fait que l’organisation est l’objet d’attaques et de harcèlement, tant de la part du crime organisé que des autorités-mêmes de l’état, qui criminalisent le système de défense qu’elle a instauré”.
Arturo Campos Herrera, dirigeant de la CRAC-PC et emprisonné depuis plus de trois ans, est un autre exemple de cette situation. Le Centre des Droits de l’Homme de la Montaña Tlachinollan a dénoncé de nouveau que “l’objectif de son arrestation était d’affaiblir la CRAC-PC (…) et de placer ses dirigeants les plus tenaces dans des prisons de haute sécurité. (…) La consigne était de faire en sorte qu’il ne puisse pas compter sur une défense efficace et de faire peur aux groupes solidaires (…) il a réussi à prouver son innocence dans quatre des sept charges à son encontre (…) Toutefois, ce qui prévaut c’est la volonté de maintenir Arturo Campos en prison parce qu’il porte la parole des peuples indigènes”.
Certains de ces peuples continuent de se mobiliser pour défendre leurs terres. 22 des 44 concessions minières de la zone Costa Chica-Montaña, ont été abandonnées par les entreprises elles-mêmes selon Tlachinollan. Le Conseil Régional des Autorités Agraires en Défense du Territoire a annoncé que ces concessions avaient été accordées sans l’accord des populations, qui n’avaient même pas été mises au courant. Les villageois empêchent les employés des entreprises de passer sur leurs terres, même pour des travaux d’exploration. Entre la Costa Grande et la Tierra Caliente par contre, des dizaines de hameaux sont abandonnées ou tombés aux mains du crime organisé. Le Centre Régional des Droits de l’Homme José María Morelos y Pavón souligne que “étrangement, dans toutes ces localités, plusieurs concessions minières n’avaient pas pu s’installer à cause des ejidos et des habitants, qui s’y opposaient”.
Comme ailleurs, se défendre comporte des risques et a un coût. On compte par exemple des nouveaux mandats d’arrêt contre 40 habitants opposés au barrage de La Parota, qui s’ajoutent aux 30 déjà lancés, selon le CECOP (Conseil des Ejidos et Communautés Opposés au barrage La Parota). L’impunité continue d’être la norme, y compris dans des dossiers aussi retentissants que la disparition des 43 étudiants de l’école normale rurale d’Ayotzinapa (2014). Malgré les difficultés, leurs parents continuent de réclamer la justice et la vérité. Des mois après que le dialogue avec le gouvernement ait été rompu, ils ont annoncé devoir se réunir avec le procureur général de la République en février.
CHIAPAS: impunité et nouveau contexte de guerre
En novembre, une marche a eu lieu à Palenque pour exiger la justice pour le massacre de Viejo Velasco (municipalité d’Ocosingo) survenu en 2006, qui s’était soldé par “4 exécutions extrajudiciaires, une arrestation illégale avec actes de torture, 4 disparitions et l’expulsion et le déplacement de 20 hommes, 8 femmes, 5 garçons et 3 fillettes”. Les participants ont rappelé que “l’objectif (…) était de semer la terreur parmi les familles de la communauté (…) afin qu’ils abandonnent leurs terres, dans le cadre du conflit agraire de la région de la forêt Lacandone. Un conflit qui, à cause de la politique d’État et sous le prétexte écologique d’“assurer la conservation de la Réserve de la Biosphère Montes Azules”, s’est transformé en un processus intensif de spoliation des terres, avec des réinstallations forcées et des expulsions violentes dans plus de trente villages indigènes”.
En décembre, cela faisait 5 ans que quatre familles de la communauté de Banavil (municipalité de Tenejapa) avaient fui leur communauté à cause d’aggressions de militants du PRI. Le Centre des Droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas a fait savoir qu’il “intervient constamment (…). Toutefois jusqu’à aujourd’hui [les autorités] n’ont pas respecté à leurs engagements (…), et ont au contraire agi de façon inefficace, sans aucun résultat dans l’enquête”.
En ce qui concerne les déplacements forcés de façon plus générale le Centre a dénoncé : “Au nombre historique de communautés déplacées depuis les années 1994-2000 qui n’ont pas pu retourner sur leurs terres à cause des menaces des groupes paramilitaires, s’ajoutent aujourd’hui des centaines de déplacé-e-s dans un nouveau contexte de guerre et de violence générées par les pouvoirs ‘de facto’ en place qui, avec la connivence du gouvernement, des entreprises et du crime organisé, ruinent la vie des villages et la vie communautaire en général, en détruisant le tissu social, pour confisquer et contrôler les territoires, ainsi que pour détruire l’organisation autonome des peuples originaires”.
En décembre, le 19ème anniversaire du massacre d’Acteal a été commémoré. Le Centre des Droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas a rappelé que 45 indigènes tsotsiles y furent « tués par le groupe paramilitaire de Chenalhó affilié au PRI, qui a agi avec l’accord et la tolérance des autorités mexicaines, appliquant une politique de contre-insurrection d’État clairement établie dans le Plan de Campagne Chiapas 94 ».
En ce qui concerne les défenseur-e-s des Droits de l’Homme, le Peuple Croyant (Pueblo Creyente ) de Simojovel a révélé en novembre que les menaces et attaques avaient repris contre ses membres et contre le père Marcelo Pérez Pérez, qui demandent collectivement depuis plusieurs années de pouvoir vivre en paix et en sécurité dans leur ville. En décembre, les bureaux de la Casa de Apoyo a la Mujer (Maison de soutien aux femmes) Ixim Antsetic à Palenque ont été cambriolés. En janvier enfin, le Centre des Droits de l’Homme Digna Oachoa a dénoncé avoir été surveillé et harcelé à Progresos (municipalité de Pijijiapan) et au barrage militaire de la route Tonalá entre Pijijiapan.
Un état mobilisé pour défendre la terre, le territoire et l’autonomie
En novembre, des milliers de manifestants sont arrivés à San Cristóbal de Las Casas après être passés par 11 municipalités des régions du Nord, de la forêt Lacandone et des Hauts Plateaux. Ils ont marché 12 jours pour dénoncer l’insécurité qu’ils subissent dans leurs villages, et appartiennent au Modevite (Mouvement en Défense de la Vie et du Territoire), “composé de 10 paroisses de 11 municipalités et 1 ejido” et dont l’objectif est d’“organiser et inciter les peuples indigènes de la zone à construire leur autonomie en tant que peuples originaires et défendre ainsi notre Terre-Mère”. Les manifestants ont coïncidé avec les associations mobilisées à San Cristóbal de las Casas lors de la Journée Internationale contre les violences faites aux femmes. C’est dans ce cadre que le Premier Congrès National Féministe avait lieu dans la ville. Les activistes et organisations présentes ont critiqué la Déclaration d’alerte de violence de genre (subie du fait de l’identité et orientation sexuelle des victimes) proclamée une semaine auparavant par certaines villes de l’état, la qualifiant d’“incomplète, discriminatoire et insuffisante”.
En décembre également, le « Forum sur la défense de la Terre, de la vie et du territoire » a eu lieu à Amador Hernández (municipalité d’Ocosingo) et s’est prononcé “contre la mise en place de la Gendarmerie Environnementale et son entrée sur [notre] territoire”. Il a été affirmé que celle-ci sert à “assurer l’entrée des multinationales qui exploitent les ressources naturelles au profit du grand capital”. Le même jour, le président Enrique Peña Nieto était dans la forêt Lacandone dans le cadre des activités liées à la COP 13 sous le slogan “Intégrer la biodiversité pour le bien-être”. Il a à cette occasion donné des instructions pour empêcher la régularisation des implantations illégales et pour garantir qu’il n’y aura pas d’activité minière dans la région.
Malgré les menaces, des milliers d’indigènes de Tila ont célébré en décembre le premier anniversaire de l’expulsion de la Mairie et la mise en place de son propre gouvernement ejidal. Depuis, “une poignée d’habitants de Tila font pression auprès du bureau du Procureur et du gouvernement pour que des forces d’oppression soient envoyées pour appliquer les plus de 20 mandats d’arrêt prononcés contre les autorités et ex-autorités de l’ejido (…), et d’autres personnes qui n’ont rien à voir.”
Enfin, le 25 janvier, des membres du Peuple Croyant du diocèse de San Cristóbal de Las Casas ont défilé pour le 5ème anniversaire de la mort de l’évêque Samuel Ruíz García, et pour célébrer les 25 ans de Codimuj (Coordination Diocésaine des Femmes). Ils ont affirmé leur objectif de “construire l’autonomie dans nos communautés, récupérer nos systèmes de gouvernement” et de “continuer de résister aux projets de mort”.
OAXACA: un nouveau gouverneur mais les mêmes vieilles problématiques
Le 1er décembre au matin, Alejandro Murat Hinojosa (PRI) devenait le nouveau gouverneur de Oaxaca –il avait été élu avec seulement 18,8% des votes. Sa prise de fonction n’a pas pu avoir lieu au Congrès, alors occupé par la section 22 de la Coordination Nationale des Enseignants (CNTE), qui avait par ailleurs mis en place 37 barrages routiers dans l’état. La section 22 a qualifié d’“illégitime” cette prise de pouvoir “mise en place en cachette des habitants de l’état, par faim de pouvoir et ambition d’autorité”.
Une vingtaine d’organisations ont dénoncé que “l’objectif immédiat du PRI est de continuer à imposer des réformes structurelles, qui leur permettent d’exploiter les ressources naturelles (…), d’obtenir de la main d’œuvre bon marché (…), de puiser dans les caisses de l’Etat sans se soucier des services publics (…); de construire encore plus d’infrastructures pour le transport des marchandises (…) et de continuer à liquider les résistances indigènes, sociales, syndicales et des Droits de l’Homme”.
Plusieurs mobilisations se poursuivent dans l’état pour défendre la terre et le territoire. En novembre, dans l’Isthme de Tehuantepec, une action de coordination a été lancée pour déposer un recours collectif contre les Zones Économiques Spéciales (ZEE) prévue dans la région. Les habitants disent qu’ils n’ont pas été informés ni consultés, et que l’objectif est d’enclencher des projets financés par des investissements étrangers, ce qui entraînerait l’expropriation de leurs terres et ressources naturelles.
En novembre également, la communauté de Magdalena Ocotlán a empêché une consultation “truquée” organisée en vue de l’extension du projet minier mené par Cuzcatlán, filiale de l’entreprise canadienne Fortuna Silver Mines. Les habitants ont fait remarquer que ce processus, réalisé avec la complicité des autorités, est “un acte de provocation, puisque nous avons décidé depuis 2005 de ne plus accepter aucun projet minier”.
En janvier, Ucizoni (Union des Communautés Indigènes de la Zone Nord de l’Isthme), qui regroupe 12 municipalités de Tehuantepec, a manifesté à Mexico contre le projet de gazoduc entre Salina Cruz et Coatzacoalcos (état de Veracruz), arguant qu’ils refusent “toutes les consultations prévues, parce qu’elles sont conçues pour servir les intérêts des entreprises”.
Ceux et celles qui prennent la défense de la Terre et du territoire courent des risques. En janvier, face au Rapporteur spécial des Nations Unies Michel Forst, les défenseur-e-s des Droits de l’Homme de Oaxaca ont dénoncé une augmentation des agressions ces 10 dernières années, et le manque de volonté des autorités pour garantir l’exercice de la défense des Droits de l’Homme. La situation en matière de liberté d’expression est également critique. En janvier, Soraya Abigail Arias Cruz, animatrice de la radio communautaire La Perla de la Mixteca a reçu des menaces de mort par téléphone “après avoir critiqué l’administration 2014-2016 de la ville de Tlaxiaco, que dirigeait Alejandro Aparicio (affilié au PRD), aujourd’hui député local”. L’ONG Artículo 19 rappelle que “l’état de Oaxaca est l’un des plus dangereux pour les journalistes”.
Tout ceci se passe dans un contexte d’impunité presque totale comme dans le reste du pays, raison pour laquelle les actions se poursuivent. En novembre, le FICAM (Front Indigène et Paysan du Mexique) a assiégé le tribunal de Huajapan de León, considérant qu’il ne fait rien pour résoudre l’assassinat de Bety Cariño et Jyri Jaakkola, survenu en 2010 alors qu’ils participaient à une caravane humanitaire à San Juan Copala.