ACTUALITÉ : “Pauvre Mexique, si loin de Dieu, si près des Etats-Unis”
07/04/2017ARTICLE : Violations des droits humains dans la région frontalière entre le Guatemala et le Mexique
07/04/2017Le 1er janvier 2017, le Congrès National Indigène (CNI) a publiquement confirmé, depuis le caracol d’Oventik, sa décision de “nommer un Conseil Indigène de Gouvernement avec des représentants masculins et féminins de chacun des peuples, tribus et nations qui le composent. (…) Ce conseil se propose de gouverner le pays. (…) Ce conseil sera présidé par une femme indigène du CNI, (…) c’est à dire de sang indigène et qui connaît sa culture. C’est une femme indigène du CNI qui sera son porte-parole, et qui se présentera comme candidate indépendante à la présidence lors des élections de 2018.”
Cette proposition, qui a suscité pas mal de confusions et de polémiques, est apparue en octobre, à la fin de la Cinquième Assemblée du CNI au Chiapas dans un communiqué commun avec l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) intitulé “Que tremble la terre jusque dans ses entrailles” (paraphrasant l’hymne national). En janvier, 525 communautés représentant 43 peuples de 25 états du Mexique avaient déjà été consultées. 430, soit 82 % d’entre elles, ont approuvé la proposition. Le processus de consultation est toujours en cours et l’assemblée constituante du Conseil Indigène de gouvernance pour le Mexique doit avoir lieu en mai, toujours au Chiapas. C’est à cette date que le nom de la candidate sera révélé.
Si l’idée vient au départ de l’EZLN et que c’est son commandement qui l’a proposée au CNI, il a aussi précisé à plusieurs occasions que “c’est bien le CNI qui décidera s’il présentera ou pas une candidate aux élections, et, il pourra, le cas échéant, compter sur le soutien des Zapatistes” et que “peu importe s’il remporte les élections présidentielles ou non, ce qui compte c’est le défi, l’insolence, l’insoumission, le fait de casser totalement l’image de l’indigène objet d’aumône et de pitié (…), c’est que le fait d’oser bouleversera le système politique tout entier et que cela fera écho, un écho d’espoir, pas seulement dans un mais dans de nombreux Mexiques d’en bas … et du monde”. L’EZLN explique aussi que “l’objectif n’est pas qu’une femme indigène du CNI devienne présidente, mais qu’un message soit transmis aux plus pauvres des villes et des campagnes du Mexique et du monde, pour qu’ils luttent et s’organisent” (communiqué de l’EZLN “Une histoire pour comprendre”, 17 novembre 2016).
Pour bien comprendre les origines de cette proposition, il est important de rappeler le chemin parcouru par le CNI depuis ses débuts. Depuis plus de vingt ans, le CNI est “la maison des peuples indigènes du Mexique”, où ont coordonne les demandes, les réunions et les actions de défense de leur terre, de leurs territoires, de leur identité et de leur culture avec pour devise “Plus jamais un Mexique sans nous” (expression de la Commandante Ramona, Mexico, octobre 1996). Dans cet article, nous tenterons d’expliquer à travers ses origines et ses avancées le comment et le pourquoi de cette proposition, par ailleurs encore en cours d’élaboration.
Après plus de 500 ans d’exploitation, de vol, de répression et de discrimination : “ça suffit”
Les peuples indigènes souffrent depuis la conquête espagnole d’exploitation, de discrimination et de pauvreté. Les livres, rapports et statistiques, anciens ou contemporains, tous confirment ce fait. L’Etat mexicain lui-même a reconnu la “dette historique” qu’il a envers ses peuples indigènes. Le professeur Luis Villoro raconte la façon dont la République Mexicaine a été fondée sur “un pouvoir criollo et métis qui a imposé sa conception de l’Etat moderne aux communautés indigènes.”
Après avoir déclaré son indépendance en 1821 et s’être libéré de la domination de la Couronne espagnole, le Mexique est devenue une nation souveraine. Les peuples indigènes ont cependant continué d’être exploités, non plus dans des encomiendas (système de servage proche de l’esclavage en vigueur dans l’Amérique espagnole) mais dans de grands domaines agricoles (les latifundia). En outre, malgré les nombreux peuples de cultures différentes qui constituaient le pays, les premières constitutions, s’inspirant du modèle européen et de son idée d’homogénéité de la Nation, n’ont jamais reflété cette pluralité culturelle.
Le soulèvement zapatiste du 1er janvier 1994 fut l’expression du ras le bol (“Ya basta” : ça suffit) face au contexte d’oppression et de marginalisation, dont les acteurs et les facteurs changeaient, mais jamais la relation de pouvoir de fond. Les 11 demandes fondamentales de l’EZLN étaient “travail, terre, toit, alimentation, santé, éducation, indépendance, liberté, démocratie, justice et paix”, et leur obtention devaient passer par “de nouvelles relations politiques entre gouvernants et gouvernés” (Première Déclaration de la Forêt Lacandone, 1994).
Entre 1994 et 1996, l’EZLN et le gouvernement fédéral ont à plusieurs reprises entamé un processus de dialogue. En parallèle et aujourd’hui encore, le mouvement zapatiste organise des rencontres et essaie de se coordonner avec la société civile (nationale comme internationale) et plus particulièrement avec d’autres peuples indigènes. En janvier 1996, l’EZLN organise le premier Forum National indigène, qui jette les bases de ce qui deviendra le CNI.
Le 16 février 1996, à San Andrés Sak’amchén de los Pobres, municipalité tsotsile des Hauts Plateaux, l’EZLN et le gouvernement fédéral signèrent les accords de la première table de dialogue sur les droits et la culture indigènes. Les propositions ne provenaient pas uniquement de l’EZLN, mais aussi des discussions menées entre les plus de 300 représentants de 35 peuples indigènes du Mexique lors du Forum National Indigène organisé le mois précédent. Appuyés par des organisations indigènes mais aussi civiles et sociales, la CONAI (Commission Nationale de Médiation) et la COCOPA (Commission parlementaire de pacification qui participait au dialogue), les Accords de San Andrés ont établi les principes historiques, politiques, sociaux, économiques et culturels qui permettraient de mettre fin au racisme, à la marginalisation et à l’exclusion de tous les peuples indigènes du Mexique et de favoriser leur libre détermination.
“Vivre la démocratie”
Le CNI a été officiellement créé le 12 octobre 1996. Les premières années, la majorité de ses activités étaient en relation avec ce qui avait été discuté et approuvé à San Andrés, ce qui semblait être la voie à suivre pour répondre aux demandes des peuples indigènes au niveau national, à la fois dans leur ensemble et dans leur diversité. Il est par ailleurs important de souligner le travail qui a également été fait en interne lors de cette première étape.
Le CNI a affirmé dès sa première déclaration son objectif principal: créer une “nouvelle Patrie”, “cette patrie qui n’a jamais pu l’être réellement puisqu’elle a voulu exister sans nous”. Dans sa première résolution, le CNI a décidé de donner son mandat à une Assemblée Nationale Indigène pour exécuter les décisions et consensus pris. Ils ont précisé qu’en tant que peuples indigènes, ils ne cherchaient pas “à reproduire les formes de domination ou de contrôle que les différents pouvoirs en place dans le pays ont utilisé pendant tant d’années pour nous opprimer, mais au contraire à établir de nouvelles manières de vivre la démocratie” (Première Assemblée Nationale, novembre 1996). Ils ont en ce sens réutilisé les principes zapatistes “Servir et non se servir; construire et non détruire; obéir et non commander; proposer et non imposer; convaincre et non vaincre; partir d’en bas au lieu de chercher à gravir les échelons; réunir et non diviser”.
Une Commission de suivi du CNI a également été créée pour mettre en application et suivre les décisions; élaborer des diagnostics, analyses et solutions alternatives; faire des propositions, des programmes de travail, favoriser les relations et la communication entre les différents groupes de travail (commission de suivi et de vérification des Accords de San Andrés, législation indigène, terre et territoire, justice et Droits de l’Homme, auto-développement économique et bien-être social, culture et éducation, communication, femmes, jeunes, et indigènes migrants).
Par cette structure, le CNI s’est ainsi établi comme un espace pluriel de rencontres, de débats et de décisions, afin de rassembler les combats et les actions visant à réaliser l’autonomie des peuples indigènes et sauvegarder leur culture et leurs territoires: “Cet espace est celui où nous représentons l’espoir et le projet d’une nouvelle humanité, parce que nos peuples ne combattent pas un gouvernement en particulier, mais un système globalisateur qui tente de nous éliminer de la planète. Ce combat avec et pour une nouvelle humanité, fait de nous, tous les peuples, des frères” (2nd Congrès National Indigène, 1998).
De la “reconnaissance constitutionnelle de nos droits collectifs” au début de la “construction de l’autonomie de fait”
Peu après avoir signé les Accords de San Andrés, le gouvernement d’Ernesto Zedillo Ponce de León (1994-2000) présenta une autre proposition que celle élaborée par la COCOPA, sabotant le processus engagé entre les deux parties. Le dialogue fut rompu. Les Accords de San Andrés sont toutefois devenus un texte de référence pour les peuples indigènes du Mexique, qui ont continué à se mobiliser et à se coordonner pour exiger du gouvernement leur application immédiate et complète, visant une reconnaissance constitutionnelle de leurs droits collectifs.
Pour légitimer cette option, l’EZLN et le CNI lancent en mars 1999 un appel à toute la population du pays, indigène ou non, à “encourager et réaliser, avec d’autres secteurs de la société, le référendum national organisé par l’EZLN, pour la reconnaissance des droits des peuples indigènes et la fin de la guerre d’extermination”. Plus de 2,5 millions de citoyennes et citoyens participeront au référendum en question, renforçant encore la légitimité des Accords de San Andrés et leur contenu.
En juillet 2000, après 71 années de règne ininterrompu, le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) perd la Présidence de la République au profit de Vicente Fox du PAN (Parti d’Action Nationale). On note dès la prise de poste de ce dernier un changement avec l’administration précédente: Fox remet à l’ordre du jour de l’agenda national le conflit armé au Chiapas, ordonne le retrait de 53 barrages militaires opérant dans l’état et présente devant le Congrès un projet de réforme constitutionnelle de la COCOPA sur les droits et la culture indigènes.
En février 2001, les zapatistes réalisent avec le CNI la “Marche de la Couleur de la Terre ” pour défendre l’importance de ce texte devant le Congrès fédéral. Ils parcourent douze états du pays et obtiennent, non sans difficulté, que la Commandante Esther parle devant la chambre des Députés – un moment porteur d’espoir pour le processus de dialogue et les droits des peuples indigènes. Devant ces mêmes députés, Juan Chávez Alonso, dirigeant purépecha de Michoacán et membre du CNI, déclare : “Nous sommes les Indiens que nous sommes, nous sommes des peuples, nous sommes des Indiens. Nous voulons continuer à être les Indiens que nous sommes ; nous voulons continuer à être les peuples que nous sommes; nous voulons continuer à parler la langue que nous parlons; nous voulons continuer à penser à notre manière; nous voulons continuer à rêver comme nous le faisons; nous voulons continuer à nous aimer à notre façon; nous voulons être ce que nous sommes déjà; et nous voulons, dès maintenant, notre place, nous voulons récupérer notre histoire, nous voulons la vérité”.
En avril cependant, le président Fox promulgue la “loi indigène”, approuvée par le Congrès National. Le CNI et l’EZLN la rejettent, la qualifiant de “trahison“ et de “farce”: elle ne ressemble même pas vaguement à la proposition de la COCOPA. Le CNI affirme que cette loi “non seulement méprise la volonté du peuple et est inconstitutionnelle, mais qu’elle représente de plus une régression importante en faisant fi de droits fondamentaux” (Manifeste du CNI sur la loi indigène, mai 2001). Il dénonce, par exemple, que le texte “ignore, pour ce qui est des territoires de nos peuples, le cadre juridique établi par la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail et ne reconnaît pas nos terres et territoires selon les concepts énoncés dans cette convention. Le terme de « territoires » est grossièrement remplacé par celui de « lieux » [habités], ce qui nous laisse dépourvus de l’espace géographique nécessaire à l’exercice de notre autonomie et à la reproduction matérielle et spirituelle de notre existence ». Il critique également cette “contre-réforme” constitutionnelle qui concède aux communautés indigènes “de manière charitable et pieuse, le caractère d’entités d’intérêt public, et non d’entités de droit public comme la proposition de la COCOPA l’établit, négligeant de garantir l’exercice de la libre détermination des peuples indigènes dans tous les domaines et à tous les niveaux auxquels ils peuvent faire valoir leur autonomie”.
Cette loi allait marquer une rupture non seulement avec le gouvernement mais avec tous les partis politiques (qui favorisèrent par leur vote son approbation), tant pour l’EZLN que pour le Congrès National Indigène. Les deux formations déclarèrent qu’ils continueraient de travailler à l’exercice de leur autonomie et de leurs droits, avec ou sans reconnaissance légale: “Nous n’allons pas attendre que l’État mexicain reconnaisse notre existence et nos droits. Nous avons déjà gagné la reconnaissance de la société civile, et nous suivrons notre chemin comme nous l’avons toujours fait” (CNI, 8ème Assemblée nationale, novembre 2001). Les membres du CNI ont proclamé les accords de San Andrés comme loi en vigueur dans leurs territoires, et ont commencé à promouvoir l’exercice direct de l’autonomie des peuples indigènes: “Nous rendrons effectifs les Accords de San Andrés en exerçant au quotidien l’autonomie indigène, la construction des autonomies communales, municipales, régionales et la revitalisation de nos peuples”.
Une autonomie en construction mais constamment attaquée
Depuis longtemps en tant que peuples indiens, mais depuis sa création de façon plus systématique, le CNI n’a de cesse de dénoncer les attaques constamment subies par les peuples indigènes : la militarisation, la répression, les violations systématiques de leurs droits et garanties constitutionnelles, ainsi que les perpétuelles tentatives du gouvernement de les diviser: “Pendant des siècles, exclus, soumis et dominés par ceux qui se sont appropriés la Patrie et qui, face à l’impossibilité de nous exterminer, ont tenté de nous détruire par des tromperies, des manipulations et des tentatives de cooptation; qui essaient à tout prix de nous diviser; qui s’emploient à nous faire croire que nous faisons partie du passé ; qui s’obstinent à vouloir nous condamner à l’oubli, au silence, à l’épuisement ou à la lente agonie de la désintégration culturelle, et attendent fiévreusement le moment de nous transformer en ruines archéologiques ou en vieilles pièces de musée ou de dévorer nos restes en décomposition” (Deuxième Congrès National Indigène, octobre 1998).
Au Chiapas, la consolidation de l’autonomie zapatiste a été rendue publique en août 2003, avec la présentation d’un nouveau niveau d’organisation régionale: les Caracoles, d’où les Juntas de Buen Gobierno (« Comités de Bon Gouvernement », structures dont les mandats sont assurés à tour de rôle par les représentant-e-s des municipalités autonomes rebelles zapatistes) assument leur rôle. Des délégués du CNI ont salué l’initiative et se sont engagés à suivre l’exemple des zapatistes en promouvant l’autonomie indigène dans tout le pays et en défendant en pratique les droits des peuples indiens.
Au Chiapas comme dans le reste du pays, la répression s’abat sur ceux et celles qui construisent leur autonomie, défendent leur territoire et s’organisent face aux menaces représentées, entre autres, par les méga-projets. On peut citer de nombreux exemples : San Salvador Atenco, dans l’état de México (en 2006, des affrontements entre la police et la population qui protestait contre la construction d’un aéroport international ont entraîné la mort de deux personnes et l’arrestation de 207 autres. Cinq étrangers ont été expulsés et 26 femmes victimes d’abus sexuels et de viols); San Juan Copalá au Oaxaca; la tribu yaqui (qui essaie d’empêcher la construction d’un aqueduc sur ses terres); Cherán (qui a décidé d’appliquer son propre système traditionnel de lois et coutumes face à la collusion entre les politiques et le crime organisé) et Santa María Ostula, Michoacán (rassemblés contre les gros projets routiers et touristiques que l’état veut imposer en territoire Nahua); Xochicuautla, état de México (contre le projet de route entre Toluca et Naucalpan), entre autres.
En octobre 2007 la Rencontre des peuples indigènes d’Amérique a eu lieu dans la communauté Yaqui de Vícam (état de Sonora), organisée par les autorités traditionnelles de la tribu, le CNI et l’EZLN. 570 délégué-e-s indigènes de 12 pays américains et représentant 66 peuples y assistèrent. L’occasion de confirmer que les difficultés les plus fréquentes pour les peuples indigènes sont en lien avec la Terre et le Territoire, non seulement au Mexique mais dans toute l’Amérique Latine. Le communiqué final annonçait de façon explicite: “Nous refusons la guerre de conquête et d’extermination capitaliste imposée par les multinationales et les organismes financiers internationaux avec la complicité des grandes puissances et des États. Nous refusons la destruction et le pillage de la Terre-Mère perpétrés à travers l’occupation de nos territoires pour la réalisation d’activités industrielles, minières, touristiques, d’urbanisation sauvage et d’agrobusiness, ou la construction d’infrastructures, ainsi que la privatisation de l’eau, de la terre, des forêts, des mers et des côtes, de la biodiversité, de l’air, de la pluie, des savoirs traditionnels et de tout ce qui naît de la Terre-Mère. Nous nous opposons au brevetage des terres, des côtes, des eaux, des semences, des plantes, des animaux et des savoirs traditionnels de nos peuples à des fins de privatisation”.
En 2009, à Santa María Ostula, municipalité d’Aquila (Michoacán), la 25ème Assemblée Générale élargie du CNI dénonçait “la répression opérée par le gouvernement et ses sbires et lancée contre nos peuples s’est matérialisée par l’assassinat et l’emprisonnement de centaines de dirigeants indigènes, ainsi que par l’occupation militaire et paramilitaire de nos territoires, criminalisant la lutte sociale et toute tentative de coordination provenant de nos peuples de façon indépendante et autonome” (Déclaration sur le droit à l’autodéfense indigène).
D’autre part, ces dix dernières années, l’analyse et les actions des groupes membres du CNI ont clairement révélé que les pouvoirs économiques et de facto (entreprises nationales et multinationales et crime organisé) ont joué un rôle croissant dans le pillage amenuisant encore les possibilités de se défendre.
Prendre des initiatives, même au cœur de la tourmente
Étant donné ce contexte d’acharnement constant, le CNI a décrété en octobre 2016, dans un communiqué commun avec l’EZLN, que “l’offensive contre les peuples ne cessera pas, mais au contraire s’intensifiera jusqu’à avoir effacé la dernière trace de ce que nous sommes, en tant que peuple de la terre”, s’est déclaré en assemblée permanente, et a annoncé qu’il entamerait un processus de consultation dans chacun de ses villages “pour faire tomber depuis la base le pouvoir qui nous est imposé d’en-haut et nous offre une vision de mort, de violence, de spoliation et de destruction”. Le CNI a clairement explicité que son combat n’a pas pour objectif “de prendre le pouvoir” mais d’appeler les peuples originaires et la société civile à s’organiser “pour stopper cette destruction […] construire la paix et la justice en nous coordonnant à partir d’en bas”. Le communiqué est à la fois la continuité et une vue en détails de ce qu’ils dénoncent. Il donne 27 exemples actuels de spoliation, de “la tempête et l’offensive capitaliste qui ne cesse pas, et qui au contraire est de plus en plus agressive et est devenue une menace pour la civilisation pas uniquement pour les peuples indigènes et paysans, mais aussi pour les citadins qui doivent imaginer des formes dignes et rebelles pour échapper aux assassinats, au vol, à la pollution, à l’enfermement, à l’asservissement, aux enlèvements ou aux disparitions”.
C’est pour cela, mais aussi malgré cela, que le CNI et l’EZLN considèrent que “le moment est arrivé d’attaquer, de passer à l’offensive”; et concluent “le temps est venu de la dignité rebelle, de construire une nouvelle nation pour toutes et pour tous, de renforcer le pouvoir de la base et de la gauche anticapitaliste, de faire payer les coupables pour la souffrance des peuples de ce Mexique multicolore”.