ACTUALITÉ : Inquiétude face à l’approfondissement de la militarisation au Mexique
10/06/2023ARTICLE : Disparition – marque indélébile de l’absence, recherche inlassable. Semence de lutte, de fraternité et de mémoire
10/06/2023« Le Sud résiste, il existe parce qu’il résiste »
« L’isthme n’est pas à vendre, il est aimé et défendu »
« Les projets du Train Maya, du Corridor Transisthmique et le projet intégral de Morelos sont présentés comme distincts. Mais nous savons aujourd’hui clairement qu’ils font partie d’un seul et même projet encore plus vaste auquel plusieurs pays étrangers et non pas seulement le Mexique participent. Pour son imposition, on a mis à disposition les forces armées les plus intenses et les plus violentes, en l’occurrence la marine, l’armée, la garde nationale, les paramilitaires, la police locale et d’état, ainsi que le crime organisé. Si cela ne suffisait pas, on a légalisé la dépossession territoriale pour bénéficier les forces armées, en argumentant qu’elles sont en faveur de la sécurité nationale et d’utilité publique ».
L e Sud Résiste est un mouvement qui réunit différentes organisations et personnes des états du sud et du sud-est du Mexique, principalement du Congrès National Indigène (CNI), qui luttent contre des grands projets. Entre le 25 avril et le 4 mai 2023, une caravane convoquée par ce mouvement a parcouru les états du Oaxaca, de Veracruz, de Tabasco, de Campeche, du Yucatán, de Quintana Roo et du Chiapas. L’objectif était de documenter les effets de ces projets (tels que le corridor transisthmique et le Train Maya) dans les territoires et de réaliser une Rencontre Internationale à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas.
Oaxaca : Résistance dans l’isthme de Tehuantepec
Dans la nuit du 25 avril, la caravane est arrivée à Puente Madera, un lieu connu pour la lutte contre l’installation d’un parc industriel faisant partie du projet de corridor interocéanique. Pour cette raison, cet endroit a été témoin de multiples sit-in et barrages routiers. Cherchant à se faire entendre, les habitants de la communauté ont accueilli la caravane avec des torches et des applaudissements. « L’Isthme n’est pas à vendre, il est aimé et défendu », criaient-ils.
El Pitayal
A cet endroit, les communautés s’opposent à l’installation d’un des 7 parcs industriels que le gouvernement fédéral cherche à construire. Plus de 350 hectares sont destinés à être utilisés pour ce faire. Par l’intermédiaire de l’Institut National des Peuples Indigènes (INPI), le gouvernement de la 4T a organisé des processus de consultation qui, selon les communautés, ne sont pas « réels », puisqu’ils ont eu recours à la contrefaçon de signatures et à des menaces directes contre ceux qui s’opposent au projet.
« Sur cette montagne, il y a une grande biodiversité de la flore et de la faune. Pour eux cet espace est une terre qui ne produit pas, mais pour nous cela signifie beaucoup. Pendant de nombreuses années, elle nous a nourri. Comme communautés indigènes, par exemple, le Mezquite est un arbre qui fournit le bois pour préparer les produits que nous mangeons et vendons et les fameuses tortilla chips de Puente Madera et San Blas Atempa. Des cerfs, des chevaux sauvages, des iguanes et des coyotes vivent à cet endroit », a déclaré l’un des dirigeants de la communauté lors d’une cérémonie de gratitude tenue à Pitayal. Pour les communautés de cette zone, le territoire va au-delà de l’espace physique, il implique le social, le communautaire, l’histoire qu’ils ont vécue et est considéré comme quelque chose de sacré pour les peuples zapotèques qui l’habitent. Si l’on détruit des endroits comme le Pitayal, des dommages irréparables seront causés à la communauté, affectant sa façon de vivre et de coexister avec la nature. C’est un aspect qui a été ignoré par le gouvernement mexicain, ont dénoncé les habitants de la région.
Depuis El Pitayal, ce n’est pas la première fois que les communautés autochtones s’opposent à des projets de “développement”; elles ont fait de même avec les parcs éoliens qui ont été construits au Oaxaca. Cependant, et comme elles l’ont rapporté à plus d’une occasion, la principale réponse du gouvernement face aux actions des peuples a été la persécution et la criminalisation des défenseurs des droits humains. En conséquence, il y a actuellement 17 mandats d’arrêt contre des membres de l’Assemblée des Peuples de l’Isthme pour la Défense de la Terre et du Territoire (APIIDTT). Le 17 janvier 2023, David Hernández Salazar, l’un de leurs dirigeants à Puente Madera, a été détenu par les autorités pendant 8 heures. Il a finalement été libéré grâce aux pressions exercées par différentes communautés et organisations de défense des droits humains à l’intérieur et à l’extérieur du pays.
« C’est un mensonge qu’ils veulent le progrès des communautés autochtones, ils ne recherchent que leurs propres bénéfices économiques, mais nous continuerons à nous battre pour nos terres et pour la vie », ont néanmoins affirmé les membres de l’APIIDTT.
Mogoñe Viejo : sit-in ‘Tierra y Libertad’
Au moment de l’arrivée de la Caravane, cela faisait 60 jours qu’un sit-in permanent bloquait la rénovation des voies du Train Trans-Isthmique. 32 communautés organisées faisant partie de l’Union des Communautés Indigènes de la Zone Nord de l’Isthme (UCIZONI) ont ainsi décidé d’exprimer leur rejet face à ce projet. Elles ont dénoncé qu’elles étaient observées quotidiennement par des membres de la marine et de la garde nationale, qui les ont menacé à plusieurs reprises d’expulser leur camp.
« Nous savons que le gouvernement du Oaxaca a déclaré que si nous ne partons pas, ils vont nous expulser. Comment osent-ils dire cela ? Ils sont les étrangers et nous sommes les propriétaires de cette terre. Nos ancêtres ont défendu cette terre, c’est pour ça qu’elle existe, alors comment vont-ils nous expulser de notre terre ? », se sont-ils interrogés.
L’UCIZONI a pour sa part dénoncée que ce projet cherche à construire des routes, des gazoducs, des oléoducs, des raffineries, des maquilas, des mines et 10 parcs industriels, ce qui implique la dépossession et le déplacement de nombreuses communautés de la zone. « De juin 2019 à mars 2023, nous avons dénombré environ 69 mobilisations de nos peuples pour empêcher les travaux d’avancer et éviter les dommages que ces projets impliqueront. Le 3 février 2023, 3 communautés se sont mobilisées ensemble : Palomares, Mogoñe Viejo et Sarabia. Présente durant ces trois mobilisations, la marine mexicaine tentait de nous intimider. C’est la réponse de la 4T à nos demandes”, a-t-elle déclaré.
Le lendemain du passage de la caravane par ce point, le camp a été expulsé par des membres de la marine et de la police. Six indigènes Mixe ont été détenus puis relâchés. La caravane, qui se trouvait à Veracruz au moment des faits, a bloqué pendant plus d’une heure la route fédérale appartenant à la municipalité d’Oteapan, pour condamner la répression.
Veracruz
Oteapan, Acayucan
Cette communauté a dénoncé que, depuis 2022, le gouvernement a tenté de déplacer les habitants de 7 quartiers : La Dina, Tierra Colorada, Tapalan, Porvenir, Rancho Alegre, Predio Viveros et El Naranjal. Leurs terrains sont situés à l’endroit où les voies du train transisthmique qui communique avec le Oaxaca devraient passer.
Depuis 2013, dans la municipalité de Jaltipan, à côté d’Oteapan, une décharge de coke à ciel ouvert a été installée. Cet endroit reçoit les déchets de raffinage du pétrole de l’usine Pemex, General Lázaro Cárdenas, à Minatitlán, Veracruz. Les communautés ont dénoncé l’impact qu’il a sur l’environnement et la santé humaine, mais jusqu’à présent, aucune agence de l’État n’a réagi. Ils ont organisé des sit-in exigeant que le gouvernement fédéral leur permette de vivre librement sur leurs territoires et de ne pas continuer à détruire le tissu social de leurs communautés.
Tabasco,
Colonia El Bosque, en voie de disparition à cause du réchauffement climatique
Dans cette communauté, on peut voir comment la mer a progressivement détruit les maisons, le jardin d’enfants, ce qui était autrefois la jetée, tout cela à cause du changement climatique. Les habitants craignent pour leur vie et l’avenir de leurs familles, qui ont historiquement vécu de la pêche. Au Mexique, c’est l’un des premiers cas connus de déplacement pour cette raison. La destruction de cette colonie met aussi fin à des années d’histoires, de tissu social, de pratiques communautaires qui leur ont permis de se maintenir dans le temps.
Avec nostalgie, les habitants observent les ruines et se souviennent de leurs voisins qui se sont déplacés pour survivre. Ils demandent au gouvernement fédéral de les aider à déménager parce qu’ils ne pensent pas pouvoir rester plus longtemps ici. Depuis février 2023, la SEMARNAT est en contact avec la communauté pour lancer le processus de relocalisation, bien que l’on ne sache pas encore combien de temps le processus peut prendre, ni le lieu vers lequel les résidents seront transférés.
Le cas de El Bosque fait réfléchir sur les politiques publiques que les États génèrent face à la réalité du changement climatique. C’est une préoccupation mondiale que les gouvernements n’ont pas parmi leurs priorités quand il s’agit d’un phénomène qui augmentera de plus en plus.
Candelaria, Campèche
Dans ce lieu se situera l’une des gares du Train Maya. La construction des nouvelles voies est déjà bien avancée. La Caravane a écouté des témoignages qui ont mis en évidence différents impacts : les habitants de plus de 300 maisons ont été expulsés et ceux qui ont résisté à la vente de leur terrain ont été menacés ou forcés d’accepter l’argent qu’on leur offrait. Ils affirment également que les infections de l’estomac et les difficultés respiratoires ont augmenté en raison de l’exposition constante aux matériaux de construction et à la pollution de l’eau. D’autres collectivités dénoncent que le projet a semé la division : d’un côté, il y a ceux qui soutiennent la construction du Train pour les bénéfices économiques supposés qu’il apportera ; et d’autre part ceux qui s’y opposent en raison des dommages irréparables qu’il causera au niveau environnemental et social.
Le fleuve Candelaria, qui a donné vie aux communautés qu’il traverse, est en train de disparaître à cause des remblais qui font partie de la construction du Train. La Caravane a pu observer à quel point un côté du fleuve semble immense, entouré d’arbres, tandis que l’autre a été en grande partie comblé et qu’il ne reste actuellement que 10 mètres pour que l’eau puisse circuler. Les communautés dénoncent qu’elles n’ont pas été consultées sur les travaux qui impliquent le fleuve et que cela constitue une violation des lois mexicaines, en particulier celles ayant trait à l’autodétermination des peuples autochtones.
Xpujil, Campeche
La Jungle dans cet état est illégalement dévastée par le Train Maya, ont dénoncé les communautés de cette région, qui pour la même raison ont présenté différents recours légaux pour arrêter la construction de la partie du projet qui affectera leur territoire. Légalement, seules des tâches d’étude devraient être effectuées, car en 2019, une suspension temporaire des travaux a été obtenue. Cette décision a ensuite été ratifiée par un tribunal collégial accordant la suspension définitive. Malgré cela, l’armée mexicaine a commencé la construction d’un hôtel au centre de la jungle et des voies pour le passage du Train. « L’indifférence des diverses instances gouvernementales face aux revendications des communautés est évidente », a déclaré un responsable communautaire.
Valladolid, Yucatán
“Jungle oui, train non ! Eau oui, train non ! Les cenotes ne sont pas à vendre, ils s’aiment et se défendent ! Ce train n’est pas maya, ce train est militaire !”, ont crié les participants de la Caravane lors de leur passage à Valladolid. Un représentant du conseil de Xpujil Calakmul a déclaré qu’ils avaient actuellement un recours judiciaire qui a arrêté la construction dans ce secteur, mais a ajouté que la Garde nationale et l’armée construisaient un hôtel qui menace de détruire l’une des jungles protégées du continent américain. D’autre part, ils ont dénoncé que plus de 9 millions d’arbres ont été abattus entre Mérida et Xpujil pour la construction de différentes attractions touristiques.
Quintana Roo
Les habitants du village Nicolas Bravo appartenant à la municipalité d’Othon P. Blanco, ont dénoncé que la section 7 du Train Maya traverse leur territoire et qu’ils n’ont pas été consultés avant les travaux. Ils ont fait part des actions en justice qu’ils ont menées, mais ont affirmé n’avoir reçu aucune réponse des trois niveaux du gouvernement. Un aspect qui les inquiète beaucoup est la construction d’un hôtel écotouristique qui affecte la jungle maya et menace de détruire un territoire sacré pour les peuples autochtones.
À Cancun et à Playa del Carmen, le modèle touristique promu par les entités gouvernementales a considérablement augmenté les taux de violence, les problèmes tels que le trafic et la consommation de drogue, les disparitions forcées et les féminicides ont augmenté. Le fameux développement dont on parle est en train de détruire le tissu social dans les communautés ; la dispute entre cartels met aussi la vie des habitants de ce territoire en danger, affirme l’équipe de communication d’elsurresiste.org dans son rapport.
« Ce modèle a impliqué retirer l’accès des gens à la plage, le territoire a été pris en charge par le grand capital du tourisme, ce que FONATUR veut, c’est réaliser ce programme de gros investissements par des hommes d’affaires, et le gouvernement est celui qui ouvre la voie afin que ces entrepreneurs puissent entrer. L’environnement, l’organisation de défense du territoire, les droits humains, sont un obstacle face à ce schéma », a affirmé un membre de la communauté.
Chiapas
L’Ejido el Progreso, Pijijiapan, résiste face aux tarifs énergétiques élevés depuis plus de 30 ans. Ses habitants assurent que bien qu’il existe au Chiapas des entreprises qui produisent de l’énergie, pour beaucoup d’entre eux, c’est un privilège de profiter de ce service. « Pourquoi devons-nous choisir entre manger, acheter des vêtements ou payer une facture qui se situe entre 1 500 et 3 000 pesos ? Nous sommes des paysans, des ouvriers, des pêcheurs, nous n’avons pas assez d’argent pour payer ces frais », a déclaré un responsable communautaire. Les communautés exigent que le gouvernement actuel respecte les promesses faites lors de sa campagne électorale. Ils disent se sentir utilisés puisqu’ils n’ont pas reçu de réponse du gouvernement face à leurs revendications une fois le processus électoral terminé.
À Tonalá, des membres des communautés du Oaxaca, de la communauté Otomi de Mexico et d’autres personnes de Veracruz, ont rejeté les projets qui offrent une idée de progrès qui convient au gouvernement et aux entreprises, mais qui, à bien des égards, détruit les vies de ceux qu’ils habitent les territoires où ils projettent de les construire. Ils exigent d’arrêter le massacre environnemental dans le sud et le sud-est du Mexique. Les droits des peuples autochtones sont violés et ceux qui élèvent la voix pour défendre la vie sont intimidés et tués, ont-ils affirmé.
La militarisation et la migration ont également été des thèmes fréquemment abordés lors de la caravane. Au Chiapas, il y a actuellement 147 camps militaires, ce qui indique une stratégie de contrôle territorial, les communautés le vivent comme une menace directe pour leur vie. Pendant le trajet entre Tonalá et Puente Madera, la caravane a été arrêtée au moins 7 fois par des membres de l’armée mexicaine, de la garde nationale, de la police étatique et de l’Institut National des Migrations (INM). Il a également été possible d’observer des groupes de migrants qui, voyant un poste de contrôle, décidaient de se précipiter dans les sous-bois pour éviter d’être arrêtés.
A Palenque, où selon des rapports officiels, 80% des travaux correspondant à la section 1 du Train Maya qui atteindra Escárcega, Campeche sont déjà terminés, les communautés ont déclaré qu’elles n’avaient pas été consultées. Elles exigent que le gouvernement investisse dans la santé et l’éducation. Elles affirment que les véritables bénéficiaires de ce projet seront les grandes puissances économiques internationales, tandis que les habitants locaux feront face à la même misère, la dépossession et la destruction du territoire qu’ils ont historiquement habité.
RENCONTRE INTERNATIONALE LE SUD RÉSISTE 2023 : Capitalisme mondial corporatif, Patriarcat planétaire, Autonomies en rébellion.
Plus de 900 personnes d’environ 30 pays et 33 peuples autochtones du Mexique se sont réunis au Centre indigène de formation intégrale CIDECI situé à San Cristóbal de las Casas, pour analyser les apprentissages de la caravane, écouter les expériences d’autres pays qui ont des luttes similaires et rechercher des stratégies de travail en réseau qui renforcent les processus communautaires qui continuent de se battre en faveur de la vie. Au cours de l’événement, des lettres de différentes parties du monde ont été lues montrant leur soutien à la résistance et aux peuples autochtones.
Lors de la réunion, certains problèmes communs ont été identifiés, tels que la présence du crime organisé dans les différents territoires, la cooptation des jeunes et des enfants par la délinquance, la division des communautés par des offres économiques ou des programmes d’assistance, la détérioration des terres due aux monocultures, aux fumigations, la pollution et le fait que l’eau est destinée aux grandes entreprises et non aux collectivités.
Résistance des peuples autochtones pour la défense de la vie et du territoire
En signe de mémoire et d’espérance, les communautés ont rappelé quelques victoires historiques qu’elles ont remportées grâce à l’organisation des peuples. Elles ont mentionné qu’elles ont organisé différentes réunions et rencontre pour renforcer les luttes, la récupération des terres et la suspension légale de projets dans différents états du pays. Elles ont souligné la lutte des femmes dans tous les territoires et le renforcement de l’autonomie à travers des réseaux de soutien entre les Caracoles zapatistes et les organisations qui soutiennent l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN).
« Il faut reconnaître deux sources d’espoir actuelles ; d’un coté, la lutte des femmes sous toutes ses formes, bien que les hommes craignent qu’elles cassent des vitres et rayent des monuments, choses insignifiantes face à la violence qu’elles subissent. D’un autre, les peuples autochtones qui se battent pour défendre le territoire ; il faut nourrir ces deux espoirs, les faire grandir et les rapprocher », fut l’une des déclarations.
Au cours de son intervention, Raúl Zibechi, écrivain et militant uruguayen, invité comme conférencier, a rappelé l’importance de considérer le trafic de drogue comme un symbole parfait du capital ; il représente la dépossession par la violence. Il a affirmé qu’il est très difficile d’identifier la frontière entre le trafic de drogue et le pouvoir car il existe une alliance entre les groupes criminels, les gouvernements et les grandes entreprises. Il a également reconnu la croissance et la multiplication des autonomies en Amérique latine, ce qu’il considère comme une victoire pleine de diversité, de couleurs et de stratégies que chaque peuple autochtone apporte avec ses savoirs ancestraux.
De son côté, Ana Esther Ceceña, économiste mexicaine, a réalisé une analyse géopolitique de ce qui se passe dans le sud-est mexicain depuis la perspective de la dispute pour le pouvoir entre les États-Unis et la Chine, ce qui laisse le territoire mexicain « au milieu » en raison de ses caractéristiques géographiques et économiques. Cela s’est accompagné de la destruction des écosystèmes, du déplacement des communautés et de l’appropriation de la culture à des fins économiques. Cependant, l’invitation n’était pas de se laisser démobiliser mais de chercher des stratégies pour continuer à défendre les territoires et les pratiques culturelles qui doivent perdurer. « Il y a aussi une stratégie de dépossession de tout ce qui est symbolique, spirituel, culturel ; un exemple est toute cette destruction de trésors archéologiques sur le parcours de ces trains, le bulldozer les casse, les détruit et ceux qui ne les enlèvent pas, les volent. Tout ce qu’on trouve, c’est de l’histoire, et on la détruit au nom d’un progrès qui n’en est pas un », a-t-elle conclu.
A la fin de la réunion, une déclaration a été lue qui disait : « La Caravane nous a permis de rencontrer la jungle qui résiste. Là où les arbres sont abattus, la vie renaît. Nous avons écouté les oiseaux et leurs messages, nous avons bu l’eau cristalline des puits et nous avons respiré l’air pur de la ruralité. Nous trouvons des peuples et des communautés qui s’organisent, résistent et ne permettent pas la dépossession ou même l’entrée d’entreprises sur leurs territoires. Ils prennent également des mesures pour récupérer leurs modes de vie, ils construisent des autonomies pleines d’espoir pour l’humanité. De l’autre, on trouve des peuples rebelles qui construisent une collectivité et une autonomie au milieu de monstres urbains ; où l’amour de la terre et du territoire refleurit. Nous affirmons haut et fort et du fond de nos cœurs qui combattent et s’organisent, que nous continuerons à nous rencontrer et à nous organiser avec d’autres luttes à travers le monde. Ni avec la garde nationale, ni avec la marine, ni avec l’armée. Ils ne nous arrêteront pas ! Pendant que vous détruisez, nous construisons”.